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"Dire, encore" & "Non, rien" d'Agnés Rouzier, aux Editions BrûlePourPoint
April 18, 2019
Agnès Rouzier, auteur injustement rangé dans l'oubli.
Un article dans un journal, ma curiosité est mise en éveil. Je ne sais rien de cet auteur. Pas même une petite évocation, ou l'ombre d'un fragment de mémoire. Mais l'intuition est là . Je fais le pas. Je commande ses deux seules œuvres disponibles.
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Je reçois les livres. Le premier contact est séduisant. Chacun est doté d'une couverture à revers, sobre et élégante. L'une bleue, l'autre blanche. Perdu sur la couverture, un titre en deux mots "dire, encore " et "non, rien", dans une typographie simple. Pas de nom d'auteur, ni celui de la maison d'édition. Juste deux mots avec une virgule. Un effet de pureté et de tension.
L'impression du texte est réalisée sur un beau papier, avec une typographie claire et des marges confortables. Tout appelle à la lecture.
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Un frisson me parcours. Une inquiétude, voir une timidité m'envahie. Comme à mon habitude, je commence par lire des pages au hasard. En réalité toujours les mêmes numéros de page (le 7, le 62 et le 58). Presque je suffoque. Je m'impose d’arrêter cette lecture. Je ne peux lire ce texte au coin d'une table. Je me dois d'y consacrer un temps dédié. Je ne suis pas pas devant une suite de mots ou une accumulation de phrases. Je suis dans un autre monde. Je suis émerveillé.
Une question me vient à l'esprit. Pourquoi cet auteur est-il ranger dans l'oubli ?
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" Je voudrai que le texte émeuve en deçà même de la compréhension et pour cela il faut qu'il atteigne à l'incantation, au chant, non comme un artifice de langage, mais comme sa vérité fondamentale"
Agnès Rouzier
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Marc Georges
le 19 avril 2019
Le poète insupportable, Cyrille Martinez, Editions Questions théoriques
March 14, 2019
Un poète, qui est cet homme étrange ?
A l'évocation du mot poète, on imagine un personnage barbu, un peu clodo, doux rêveur, voir marginal avec un penchant anarchiste. Quelle erreur ! On est dans le parfait cliché, si pratique pour ranger ces poètes, dont notre société ne sait trop quoi faire et dont nos décideurs ont souvent peur.
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Un poète, c'est Monsieur-tout-le-monde. Il y en a des riches, des pauvres; des volubiles; des taiseux, des sympathiques, des ours; des peoples, des inconnus. Bref il y en a de partout, dans toutes les strates de la société.
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Etre Poète, ce n'est pas mettre quelques mots sur un papier. Ce n'est pas un titre que l'on se décerne. Etre Poète, c'est avant-tout un état d'esprit. C'est une façon de voir la vie. Récemment, une amie me disait que dans la gestion d'une de mes affaires, j'étais poète. Avec réflexion, je pense c'est elle qui a raison. Malgré les contraintes du monde économiques, je suis resté poète dans mes décisions. Il y a quelques années, j'étais au fin fond de la Chine, dans une ville militari-industrielle, moche et polluée. Pourtant, j'y ai vu de la poésie. J'y ai réalisé un des mes plus beaux travaux photographiques. La Poésie peut etre écriture, chanson, peinture, photographie. Ces créations ne sont que la représentation de cet d'esprit si particulier qu'est la Poésie.
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Qu'est que la vie d'un poète ? Cyrille Martinez nous la raconte à travers 24 anecdotes réelles et concrètes. On ri, on grince des dents. On découvre une réalité bien loin d'un monde bucolique.
Livre intéressant, voir indispensable, on peut le comparer au travail d'un anthropologue sur la place du poète dans notre société. Non du point de vue de son rôle social, mais sur celui de son intégration.
On y découvre que la bibliographie de François Bayrou et celle de Jean Lecannuet sont de belles poésies. Comme quoi la poésie est avant-tout un état d'esprit.
Houellebecq, la vie absente, J.-N. Dumont, Editions Manucius
February 21, 2019
Houellebecq par ici, Houellebecq par-là , …
Dès que cet auteur écrit un livre, nous avons le droit à un déferlement d’enthousiasmes et de critiques. D’une telle quantité, que l’auteur, lors de la sortie de son dernier roman en janvier 2019, a pris la poudre d’escampette, préférant se cacher au Japon pour plusieurs mois. À croire que la vie littéraire française se réduit à cet auteur. Que faire du Houellebecq bashing vaut certificat de culture.
Dans les critiques lues ici ou là , trop souvent est fait un mélange entre l’homme et son œuvre. Certes le personnage est déconcertant, mais ses livres ne sont pas lui, ils sont son œuvre. Mixer l’homme et ses textes reviendrait à bannir l’œuvre de Céline, à remettre en question celle de Camus, à jeter celle de François Villon.
Les écrits de Michel Houellebecq méritent-t-ils l’intérêt que certains leur prêtent. Sans aucun doute possible, je réponds oui. Il est vrai qu’on ne lit pas un Houellebecq comme on va au bal un samedi soir. Ce n’est pas une lecture de gare en attente du train. C’est une expérience, un voyage dans un monde peu souriant. Il y a dans ses livres un coté célinien, la médiocrité du monde, avec une touche de Francis Bacon, des obsessions dérangeantes. On est loin du classique d’un Lamartine, d’une écriture romantique du XIX siècle, ou du style engagé de Zola. Houellebecq peint avec des mots la réalité de notre époque, le romantisme destructif de ce XIXème siècle. Ce temps où les utopies ont disparues, où l’espérance n’a guère de cour.
J.-N. Dumont, philosophe, qui a écrit des livres remarquables sur Pascal, Marx, Péguy, s’est attardé sur Houellebecq et son œuvre, à travers un essai « Houellebecq, la vie absente » (aux éditions Manucius). Il propose un exercice de lecture approfondie de l’œuvre de Houellebecq, et donne à comprendre pourquoi celui-ci est un grand écrivain.
« Houellebecq appelle vie absente la désintégration du sujet occidental sous l’effet des modes et de l’opinion La formule rimbaldienne est ainsi remplie de manière inattendue : la vie vraie est absence … Houellebecq ne peut ni parler avec assurance ni se taire. Il faut bien, à tout hasard, faire une sorte de geste… C’est dans ce que nous ne pouvons pas dire que s’organise la nécessité de parler, l’impossibilité de se taire. Le roman nait de cette impossible résignation à l’indicible, l’absence de Dieu fait de toute existence, fit-elle la plus vulgaire ou la plus insignifiante, une protestation contre l’absurde. L’absence même de Dieu met chaque vie devant un pari. Écrire pour Houellebecq, est une manière de saisir sa chance, d’habiter tout de même l’absence :
« J’ai nettement vu Dieu en son inexistence
Dans son néant précieux et j’ai saisi ma chance » (Houellebecq, La possibilité d’une île)
J.-N. Dumont « Houellebecq, la vie absente, Éditions Manucius.
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La Bibliothèque secrète de Régine Deforges, Editions Tohu Bohu
December 22, 2018
Montre-moi ta bibliothèque et je serais qui tu es.
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Une bibliothèque personnelle est toujours le reflet de l'âme profonde et cachée de son propriétaire.
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Régine Deforges, connue pour la saga "La bicyclette bleue" est bien plus que cet auteur grand public. Derrière cette notoriété de romancière de gare, se cache une femme exceptionnelle, en avance sur son temps, d'une grande érudition et surtout libre.
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Les éditions Tohu Bohu en éditant les livres de sa bibliothèque personnelle, révèle la grandeur de cette femme de lettres. A raison de quatre titres par semestre, elles vont nous faire découvrir son immense bibliothèque, que ce soit par sa dimension physique (plus de 100 000 ouvrages) que par sa dimension littéraire : la découverte de textes rares, oubliés, inconnus, curieux ou étonnants.
Avec un clin d’œil malicieux, les éditions Tohu Bohu impriment ces livres sur un joli papier bleu, rappelant "La bicyclette bleue", cette saga populaire en 10 volumes qui permit à Régine Deforges d'être présente dans plus de 10 millions de foyers français
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L'édition de sa bibliothèque secrète va conduire au désespoir certains intellectuels. Il leur sera difficile de cantonner Régine Deforges au rôle de romancière de la bicyclette bleue.
Frans Masereel, Editions Martin de Halleux
December 16, 2018
Franz Masereel, le precuseur du roman graphique
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Franz Masereel, ce nom ne vous dit rien. Pourtant vous avez obligatoirement vu un de ses dessins ou une de ses illustrations. Né en Belgique en 1889, mort en France en 1972, il laisse une oeuvre clé dans l'art du XX siècle. Il a donné ses lettres de noblesses au roman graphique. Il a en fait un art en tant que tel. Il fut un précurseur de la BD.
Ses oeuvres toujours engagées et en noir et blanc, défendant les opprimés et dénonçant les horreurs de la première guerre mondiale, sont des romans en images et sans paroles. Elles vont susciter l’admiration de ses contemporains. Hermann Hesse écrira : « Masereel était réellement le seul homme qui, jour après jour, fit quelque chose de sensible, quelque chose de bien, quelque chose dont nous pouvons être reconnaissants ».
Les éditions Martin de Halleux avec deux livres nous plonge dans l'univers de cet artiste
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1 - La réédition de "Idée" roman graphique de Franz Masereel, publié en 1920, l'œuvre maîtresse de cet artiste racontant en 83 images la vie d’une idée. Cette idée qui prend la forme d’une femme est rebelle et subversive, elle sème sur son chemin zizanie, peur, rejet ou étonnement, mais ne laisse jamais indifférent. Elle ira jusqu'à se reproduire en se jetant entre les cylindres d’une presse d’imprimerie pour répandre un peu plus encore le doute et la liberté au cœur d’une société injuste et violente.
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2 - Une monographie " Franz Maserrel, l'empreinte du Monde", la plus importante encore jamais publiée avec une sélection de 391 gravures sur bois. Les gravures reproduites ici ont été retrouvées dans des fonds à travers toute l’Europe, musées ou collections privées, principalement en Allemagne, en Belgique et en France…
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Enrichie d'un texte inédit d'entretiens de Frans Masereel avec son éditeur Pierre Vorms dans lesquels l’artiste évoque la genèse de ses travaux et d'une biographie signée Joris van Parys.
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Réunies en douze chapitres (La guerre danse macabre ; Du côté des faibles et des opprimés ; Dans les villes ; Dans les ports ; Bestiaire ; Nature ; Les Flandres, la Belgique ; Amour, désir et séduction ; Moments intimes ; Spleen ; Figures ; Rebelle et libre) ces 450 gravures de Frans Masereel offrent un panorama inédit de son univers graphique à travers les grandes thématiques qui traversent toute sa production de 1919 à 1971.
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Les Lettres Africaines
December 15, 2018
Les Lettres du continent de l'oralité.
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L'Afrique est le continent de l'oralité. La parole, le palabre priment sur l'écrit. Avant de prétendre pouvoir écrire, il faut savoir parler.
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De cette culture de l'oral sont nées les Lettres Africaines. Une écriture vivante, imagée, trop souvent négligée chez nous. Souvent écrites dans un français parfaitement maîtrisé, d'un académisme surprenant, et avec une créativité des expressions.
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Ces Lettres Africaines sont la preuve que la langue française est vivante, qu'elle évolue, qu'elle s'aventure dans de nouveaux terroirs.
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Cet apport, cette jeunesse va donner un souffle à notre langue. Elle va lui permettre d'être une des langues du XXI siècle. Le latin, malgré ses poètes, ses érudits, a disparu car il était resté la langue d'un terroir. Il n' acceptait pas les nouveaux mots, les novations. Il était devenu la langue de quelques exclusifs, pour finir en langue morte.
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Les Lettres Africaines sont un apport salvateur à la langue française, dans un monde où la langue anglaise tend à devenir le langage universel et incontournable.
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Alors n'hésitez pas à découvrir ces auteurs africains !
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NB : En photo, l'écriture Bamoun, plus récent alphabet crée par l'homme (créé vers 1930, au Cameroun par le Sultan du Royaume Bamoun)
Premiers romans
December 13, 2018
Un premier roman, la preuve que l'écriture est toujours un art vivant.
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Lire un premier roman, c'est la découverte d'une nouvelle oeuvre, d'un nouvel artiste. C'est être précurseur. C'est prendre un risque. C'est accepter de sortir des chemins balisés de l'édition.
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Lire un premier roman, c'est encouragé l'auteur à poursuivre, à écrire à nouveau.
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Un premier roman n'est jamais parfait. Il est à la fois brut, authentique et frais. Il y a comme une naïveté généreuse dans l'écriture du nouveau romancier. Comme le souffle d'un ado qui croit qu'il va conquérir le monde. La perfection et la sagesse viendront après.
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Lire un premier roman, c'est un acte militant pour la défense des lettres de demain. Pour que l'écriture continue à vivre. Pour que l'écriture soit toujours un art vivant.
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Alors osez lire des premiers romans !
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NB: en illustration, "le dit du Genji" de Murasaki Shikibu , écrit en 1007; il est dit que ce serait le premier roman écrit de l'histoire de l'humanité.
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Les amours d'un fantôme en temps de guerre, Nicolas de Crécy, Editions Album Michel
December 12, 2018
Un flirt passionné entre le texte et l’image.
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Une écriture sensible, aérienne, et des planches muettes. Des décors travaillés, des états d’âme murmurés, des couleurs vaporeuses, et des lavis d’émotions. Plume et crayon se nourrissent l’un et l’autre, s’accompagnent, pour nous narrer l'histoire d'un jeune fantôme orphelin dans un monde en guerre.
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"Roman graphique ? Roman illustré ? Qu’importe : Les amours d’un fantôme en temps de guerre est un livre émouvant, qui par les morts raconte les vivants. Les illustrations fourmillent de détails, dévoilant dans leur jeu de couleurs une tristesse – des teintes presque mélancoliques." Actualitté 19 Octobre 2018.
"Le livre, singulier, aussi urgent que beau, a reçu le prix Vendredi, qui récompense, chaque automne, un roman destiné aux adolescents." Télérama 20 novembre 2018.
Marc Pautrel
December 11, 2018
La plus belle découverte littéraire de 2018. Un jour, il recevra le Prix Goncourt.
Homme de lettres, il écrit bien plus que des romans. Il construit une oeuvre littéraire.
Il ne cesse d'écrire, comme un pianiste ne cesse de jouer.
Lisez son carnet, la poésie est là . On y entend une impro de jazz aux accords parfaits.
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"J'ajoute des mots aux mots, je sais que ma montagne grandit et que le temps joue pour moi." Carnet, jour 345, 11 décembre 2018, Marc Pautrel.
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"Il est vrai que cela fait sept livres que je publie et je me dis chaque fois que je ne pourrai pas écrire le suivant parce que je n’ai pas d’idée. On essaie, les plans, les idées, les squelettes, les phrases, j’en ai plein les tiroirs, et il ne se passe rien. Mais au bout d’un an, quelque chose revient qu’on avait oublié, qu’on reprend, d’un coup ça s’éclaire. A moins que, sans me rendre compte, j’aie continué à travailler tout le temps sur le texte. A l’origine, la Vie princière est un mail. Je ne sais plus à quel moment je commence à retravailler. Entre le moment où il s’agit d’un texte personnel et celui où ça devient un manuscrit… il se passe beaucoup de choses inconscientes, c’est du texte, ça vit. Ce n’est pas une science exacte, il y a quantité de ratés, de perte. Comme un explorateur qui partirait très loin mais dans toutes les dimensions, sur des chemins qui ne mènent nulle part. Et puis en ouvrant toutes les portes, il y en a une qui ouvre sur le soleil." Interview de Marc Pautrel dans Liberation du 9 Février 2018.
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Paysages, Rainer Maria Rilke, Editions Marguerite Waknine
December 10, 2018
Quand une poète se met à parler d'art.
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Les trois textes réunis ici se rangeraient classiquement dans la catégorie des écrits sur l'art. Or, il n'en est rien. Ils sont plus, et beaucoup plus encore. Même s'ils abordent effectivement la question du paysage en peinture ou encore la troublante et silencieuse présence des choses, ces trois textes doivent être considérés à part entière comme des pierres apportées à l'édification de l'oeuvre de Rainer Maria Rilke.
En effet, aux côtés de la prose et de la poésie, ces trois écrits sur l'art participent pleinement à la quête de l'unité profonde à laquelle tâchent de s'accorder l'oeuvre et la vie de Rainer Maria Rilke. Et déjà est-il permis de dire qu'ils y répondent, qu'ils l'accomplissent et la révèlent en la portant à cette lumière tout intérieure dont est empreinte l'écriture spirituelle de Rainer Maria Rilke.
Dans une lettre datée du 10 août 1903, adressée à Lou Andreas Salomé, Rilke se plaisait à rapporter cette déclaration de Hokusai : C'est à l'âge de soixante-treize ans que j'ai compris à peu près la forme et la nature vraie des oiseaux, des poissons et des plantes. Sans doute aucun, ces trois textes répondent à cette exigence comme les témoins d'une expérience faite de bonté, de patience et d'humilité.
My absolute darling, Gabriel Tallent, Editions Gallmeister
December 09, 2018
Un premier roman digne des plus grands
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Premier roman hors-norme sur les relations entre un père incestueux et sa fille. L'auteur, Gabriel Tallent, tout juste trentenaire a mis huit ans pour pour coucher sur le papier ce texte. Sa force coupe le souffle . Sa réalité dérange. Un « chef-d’œuvre » pour Stephen King.
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Dans les grandioses paysages de la Californie du Nord, Julia, jeune ado surnommée Turtle ou Croquette, partage sa vie avec avec son père dans une cabane en bois. Celui-ci écolo-alcoolo-survivaliste, enferme sa fille dans un huis-clos. Violent, incestueux , il la traite de « connasse », et ne cesse de lui dire qu’elle est son « amour absolu ». Turtle n'a que 14 ans, elle survit entre haine et amour.
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L'auteur, avec justesse et délicatesse, dans un style rare, nous dévoile les liens entre l’enfant abusée et ce père incestueux, manipulateur et humiliant. Pour ne pas sombrer, Turtle s’évade; à son collège, dans cette forêt qu’elle connaît si bien. Elle rencontre Jacob. Il l'a fait rire, il est gentil avec elle, il lui ouvre la porte d'un autre monde...
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"Un premier roman absolument fascinant que livre Gabriel Tallent avec My Absolute darling. Chaque description transperce l’âme du lecteur, l’éloigne de son univers familier et rassurant, le pénètre profondément et longuement, le fait tressaillir, le submerge, le déroute." Actualitté 25/04/2018.
Imagine John Yoko, Yoko Ono, Editions E/P/A
December 08, 2018
En 1971, lorsque John Lennon travaillait sur son deuxième album solo, il a écrit le morceau « Imagine »sur son piano à queue blanc, dans sa chambre à Tittenhurst Park, sous le regard amoureux de son épouse Yoko Ono. Quand il le masterise en studio, il y ajoute de la basse, de la batterie et un arrangement de cordes, épaulé par Phil Spector.
Hymne pacifiste et utopique, Imagine est considérée comme une des meilleures chansons pop jamais créées, le magazine Rolling Stone la consacrant troisième plus grande chanson de tous les temps ayant façonné le rock and roll. Le 14 juin 2017, la National Music Publishers Association lui décerne le prix de la « Chanson du siècle ».
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Ce livre raconte l'histoire de cette chanson, devenue monument historique.
Rassemblés par Yoko Ono, documents d’époque, témoignages et archives retracent la genèse du mythique album Imagine, enregistré en 1971 entre Londres, le manoir de Tittenhurst Park et New York – un livre-hommage à l’une des plus belles collaborations artistiques du XXe siècle, éternel écho d’un vibrant message de paix.
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Argent, Christophe Hanna, Editions Amsterdam
December 07, 2018
Où quand un poète parle d'argent
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Durant quatre années, Christophe Hanna a enregistré et retraduit les propos relatifs à l’argent des personnes avec qui il entrait en contact pour les besoins de l’écriture de son livre. Auteurs, éditeurs, poètes, journalistes, directeurs d’institutions artistiques, familles, élèves et parents d’élèves sont ici réunis et classés par segments salariaux, dont la forme diagrammatique reproduit à l’identique la répartition des salaires en France. De Christophe254 à Pierre16000 en passant par Hocine1500 ou Nathalie2400, ce « rapport », où se devine l’influence de Francis Ponge, dessine un portrait statistique, trivial et intime à la fois, d’une partie du champ littéraire poétique, de ses protagonistes et de ses institutions.
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" - L'argent des poètes -
Argent intéresse et offre une vraie matière à penser. Il montre l’envers du décor d’une population française très spécifique, qu’un artiste d’origine arménienne chanta sous le nom de « bohème », en un temps où l’art a souvent des allures de marché boursier mondial, et la poésie des allures de loup au cou pelé, celui de la fable « Le Loup et le Chien ». ... Ils et elles sont écrivains, poètes, plasticiens, performeurs, enseignants, éditeurs… de tous âges mais plutôt jeunes, de toutes conditions mais plutôt peu fortunés, d’un seul pays, la France, aujourd’hui, depuis 2013. Combien gagnent-il et comment ? Combien dépensent-ils et comment ? Quel est leur rapport à l’argent ? Quel regard ont-ils sur les inégalités criantes de revenus de notre société ? Christophe Hanna les a tous interrogés pour composer un essai personnel et sobrement intitulé Argent."
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Cécile Dutheil, la Revue "En attendant Nadeau".
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Njinga, Histoire d'une reine guerrière (1582-1663), Editions La Découverte
November 23, 2018
Njinga, une reine africaine un peu trop vite oubliée
Puissante reine d’Afrique centrale, Njinga ne recula devant aucun moyen pour préserver son territoire des colonisateurs portugais esclavagistes. Au XVIIe siècle, cette figure guerrière transgressive, dont l’intelligence n’eut d’égale que la ténacité, défia toutes les lois du genre : politiques, religieuses, sociales.
À la tête d’une armée de soldats femmes et hommes, la reine Njinga mena une guerre sans merci contre les envahisseurs qui ravageaient et dépeuplaient l’Afrique centrale, y capturant des esclaves pour les déporter au Brésil dans les plantations de canne à sucre. Njinga décida même de rejoindre la secte terrifiante des Imbangala cannibales afin de contrer un ennemi mieux armé. Elle sut aussi, en fin stratège, jouer les capucins contre les jésuites, véritables artisans de la colonisation et du trafic d’esclaves, pour conduire une campagne diplomatique d’ampleur. Elle finit par obtenir la reconnaissance de son royaume par le pape Alexandre VII et par conserver son indépendance.
Femme libre, reine courageuse et fière qui défendit ardemment son rang et son africanité, Njinga reste vivante dans la mémoire des descendants d’esclaves, en Amérique comme en Afrique centrale. Linda Heywood rend enfin justice à ce personnage hors norme, qui a toute sa place dans l’histoire mondiale.
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Éditions du Murmure
November 15, 2018
Editions du Murmure
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En ce temps de gilets jaunes, mettons en avant cette discrète maison d'édition portant fièrement la couleur jaune.
Sans bruit, ni fureur, ils publient des textes (im)pertinents d'auteurs dont on ne peut douter ni de leur séreux, ni de leur érudition.
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"Mad Max, l'apocalypse sera motorisée" de AD Leiva
Une réflexion sur la place de la motorisation dans notre société.
Et si cela nous menait au déclin ?
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"Esthétique du livre vide" de TG
Une parabole sous forme de réflexion
Une "fable". Un livre vide en dit bien plus que d'autres ...
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"Douces fessées, plaisantes caresses" de Sébastien Hubier
Enfin quelqu'un qui parle autrement de la fessée.
Ni en violence, ni en sadisme, juste en douceur.
"Bêtes sans patrie", Uzodinma Iweala, Éditions de l'Olivier
September 28, 2018
"Bêtes sans patrie", Uzodinma Iweala, Editions de l'Olivier
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Livre coup de poing, performance littéraire, texte inoubliable, je ne sais trop quel qualificatif attribué à ce livre.
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De prime abord, ce qui a suscité ma curiosité c'est le fait que ce livre soit traduit par Alain Mabanckou. Je me suis demandé pourquoi un auteur reconnu s'était engagé dans la galère d'une traduction. La seule justification possible : l'intérêt du texte. J'avoue que je ne fus pas déçu.
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Le livre raconte la vie d'un enfant soldat en Afrique. Le sujet a déjà été traité par des écrivains ayant été enfants soldats, ou écrivant la biographie réelle de l'un d'entre eux. Ici, ce n'est pas le cas. C'est un roman, une fiction. Toute la force du livre est là . L'auteur se met dans la peau d'un enfant-soldat. Il le fait parler. Il couche sur le papier les émotions, le ressenti, la violence, les horreurs, le quotidien de celui-ci. Il utilise son vocabulaire, ses phrases. On est dans sa tête. On voit avec ses yeux. L'auteur ne donne pas dans le misérabilisme. Il utilise un ton presque serein et détaché pour raconter cet indicible. La justesses du texte est telle que l'on pense que c'est une oeuvre autobiographique. Ce n'est pas le cas, l'auteur est un américain issu d'une grande famille nigérienne, médecin et diplômé d'Harvard section lettres. Ce livre est son premier roman.
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La performance littéraire est incontestable. Agu, l'enfant soldat imaginaire de ce roman est vivant. Il est là devant nous. Avec son phrasé déconstruit, il témoigne d'une réalité. Il nous interpelle sur cet indicible.
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La construction des phrases est chaotique. Elle rend parfois la lecture difficile. L'écriture sonne juste. Ce n'est pas un artifice. C'est Agu qui pense. On entend le son de sa voix.
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Ce livre est une fulgurance. On pressent qu'il a été écrit d'un jet. C'est Agu qui se raconte. Il s'interroge sur cet indicible qu'il vit.
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"Bibliuguiansie", Nicolas Auzanneau, Éditions PhB
September 19, 2018
"Bibliuguiansie", Nicolas Auzanneau, Editions PhB
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En cette rentrée littéraire, c'est la petite madeleine que je vous propose de savourer. Histoire de stimuler vos papilles littéraires.
Le "pitch" du livre est simple :
L'auteur, intellectuel français, est à Riga en Lettonie. Chez un bouquiniste, il achète un dictionnaire Letton-Français publié en 1941. A cette date, la Lettonie était partagée entre les Russes et les nazis. Il ne faisait pas bon d'y parler français.
L'auteur va s'attacher à découvrir qui a écrit ce dictionnaire . Qu'est devenue cette personne ? Pourquoi une telle démarche à cette date ?
Avec un style simple et direct, il nous emmène dans ce Riga de 1941. Il nous fait découvrir ce pays, sa culture. Il nous fait partager les surprises, les questions naissantes de cette quête.
Livre écrit par un érudit, sujet pour érudit, l'auteur réussi le tour de force de rendre accessible et très vivante cette chasse.
Il n'y a pas de trace de pseudo ésotérisme, ou de mystère à deux sous, trop souvent présents dans les romans ayant pour acteur principal un livre. Ici pas de bibliothèque secrète du Vatican, ou de livre cabalistique. Juste une élégante recherche d'une vérité, qui nous transporte dans l'histoire et la culture.
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Ce court livre est une savoureuse madeleine, qui réveille tous nos sens littéraires. L'intrigue, le savoir, le voyage, avec un français parfaitement maîtrisé et un soupçon de poésie.
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Copie de -"Pleins feux sur nos dictionnaires en 2500 citations", Jean Pruvost, Éditions Honoré Champion
June 14, 2018
""Pleins feux sur nos dictionnaires en 2500 citations", Jean Pruvost, Éditions Honoré ChampionPleins feus sur nos dictionnaires en 2500 citations", Jean Pruvost, Éditions Honoré Champion
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S'il y a un dictionnaire à posséder, c'est celui-là . Il ne présente qu'un seul danger. Une fois que vous l'aurez lu en continu ou en zapping, vous n'aurez de cesse que d'acheter d'autres dictionnaires.
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2500 citations consacrées aux dictionnaires, 2000 articles recueillant les réflexions surprenantes, drôles, insolentes, profondes, pétillantes de plus de 700 personnalités, écrivains, savants, humoristes, journalistes, lexicographes, chanteurs s’exprimant sur le sujet… Avec en fin d’ouvrage un index permettant par exemple de savoir ce que Racine, Brassens, Baudelaire, Tahar Ben Jelloun, Paul McCartney, Woody Allen, Georges Feydeau, l’Académie française, Pierre Larousse, Paul Robert, ont pensé des dictionnaires.
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« Je dors avec le dictionnaire, fidèle accompagnateur qui est à la fois la table et le procureur. » Bruno Dewaele, champion du monde d’orthographe, 2014.
« Un jeudi du printemps dernier, la compagnie que j’ai le plaisir de représenter cet automne a fait entrer un mot nouveau dans son dictionnaire : le mot convivance », Florence Delay, de l’Académie française, 2001.
« Les dictionnaires se copient les uns sur les autres, c’est les mêmes mots ! » J.-M. Gouriot, Brèves de comptoirs, 2007.
« Une chose est sûre, le dictionnaire n’a pas dit son dernier mot. » Jérôme Robert, 2017.
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Un livre rare, où au plaisir de lire se mêlent humanisme, érudition, surprise, et poésie.
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"Personne n'a jamais considéré le dictionnaire comme une composition dans le sens poétique du mot" disait Baudelaire. Si, une personne l'a fait. Jean Pruvost, l'auteur de ce dictionnaire
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, offre un plaisir de lecture raffiné. Sans effets de manche, sans vocabulaire tonitruant, elle nous fait vivre les villages de cette Roumanie, d'une Europe rurale humaine et heureuse aujourd'hui disparue.
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A redécouvrir au plus vite
"Isvor, le pays des saules", Princesse Bibesco, Éditions Bartillat
May 25, 2018
"Isvor, Le pays des saules", Princesse Bibesco, Éditions Bartillat
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« Comment ne pas aimer la Roumanie après Isvor ? » écrivait Rainer Maria Rilke.
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Revenant dans sa Roumanie natale, la princesse Bibesco trace le portrait d’un pays avec ses coutumes, ses légendes et ses travaux saisonniers. « Isvor m’a été inspiré par la vie quotidienne des villages, par les rites traditionnels observés dans leur existence millénaire, par les paysans de ce domaine forestier de la montagne où j’étais venue vivre (…) Ce livre était fait de notes que j’avais prises au jour le jour ; il ne contenait pas une seule histoire qui ne fut vraie, un seul épisode inventé », confiera-t-elle plus tard. Avec délicatesse et précision, l’auteur décrit les jeux des enfants le long des routes, les femmes aux champs, les mariages, les rituels de la mort. On découvre ainsi l’intimité d’une société rurale attachée à ses pratiques ancestrales. Guidée par Outza, une vieille paysanne, Marthe Bibesco nous raconte la vie simple et profonde de son peuple qui a conservé des habitudes héritées du temps des Romains : « Eux aussi comme moi, furent des étrangers venus d’ailleurs, obéissant à une loi mystérieuse. »
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Marthe Bibesco, princesse roumaine, femme de lettre, elle fut un des rayons de soleil de la littérature française de la première moitié du XXéme siècle. Amie des Anglais, des Belges, des Français, des Allemands, elle fut européenne avant l'heure. Aujourd'hui oubliée et disparue des bibliothèques, elle est pourtant une des plus élégantes plumes de la langue de Molière.
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Son style simple et maîtrisé, offre un plaisir de lecture raffiné. Sans effets de manche, sans vocabulaire tonitruant, elle nous fait vivre les villages de cette Roumanie, d'une Europe rurale humaine et heureuse aujourd'hui disparue.
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A redécouvrir au plus vite
"Comment un adolescent maniaco-dépressif inventa la fraction armée rouge au cours de l’été 1969", Franck Witzel, Éditions Grasset
May 18, 2018
"Comment un adolescent maniaco-dépressif inventa la fraction armée rouge au cours de l’été 1969", Franck Witzel, Éditions Grasset
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Comment commémorer Mai 1968 ? Pléthore de livres sont publiés à ce sujet. A croire que les éditeurs ont trouvé une nouvelle martingale commerciale. Qui un recueil des affiches de l’époque, qui l’analyse de tel ou tel penseur, qui un historique sur les faits.
Pourtant Mai 1968 demeure toujours un mystère. Pourquoi cette explosion sociale ? Pourquoi à ce moment-là ? Pour quelles conséquences ? Chacun va y aller de son jugement, de son anecdote. Personne n’est capable d’expliquer le comment de ce mouvement. Doit-on le classer en mouvement social, en révolte, en poussée d’acné estudiantine ? La seule chose qui peut etre affirmée, c’est qu’il y a eu en Mai 1968 la convergence des contestations, phénomène tant souhaité et espéré par nos syndicats actuels.
Mai 1968 n’était-il que spécifique à la France ? Ce vent de révolte a-t-il essaimé en Europe ? Dans le Monde ? Oui et non. Il y a eu à des dates similaires des mouvements sociaux importants, tant aux Usa, en Allemagne, en Italie, qu’en Europe de l’Est. Étaient-ils liés ? En parti.
Le livre présenté parle de ce mouvement en Allemagne. Si en France, nous avons eu les pavés, les CRS et Cohn Bendit. En Allemagne, le mouvement fut plus « sérieux ». Ce ne fut pas une foire estudiantine mixée à un mouvement ouvrier, ou « la chienlit » comme le disait le Général de Gaulle. Ce fut la naissance de la Fraction armée rouge. Un mouvement contestataire adepte du terrorisme et la violence extrême.
Avec 1900 pages, 98 chapitres, à travers la voix d’un adolescent allemand de l’époque, l’auteur nous plonge dans cette Allemagne de 1969.
Le livre, véritable pavé, au sens propre comme au sens figuré, nous entraine dans cette folie. Loin d’une écriture académique, ou d’une quelconque commémoration, l’auteur fait vivre une jeunesse vacillante, débordante, perdue. Il nous parle de cette Allemagne des années 1960, catholique, austère, prospère, qui cache son passé nazie. Le roman narre le road-movie de cette jeunesse qui ne veut plus de carcans, qui découvre le passé peu glorieux de leurs parents et grand-parents. Tous les repères s’effondrent. Il faut abjurer, annihiler cette histoire, cette culture allemande. C’est un chemin de survie qui va mener certains jusqu’à la folie.
La force du livre, c’est sa construction et son style. L’auteur a mis 15 ans pour l’écrire. Les mots, les phrases sont fidèles à l’esprit de la Fraction armée rouge. Une utopie de paumés qui finit en folie destructrice. Les détails historiques sont négligés, ce qui prime c’est de retranscrire la mécanique qui a conduit ces jeunes à cette violence. Rien n’était prévu. Il n’y avait pas de plans ni de stratégies. Juste un enchevêtrement de pensées, de réflexions et d’actes. Par son écriture, l’auteur nous fait vivre ce cheminement. Le texte passe de l’essai, à la poésie, puis revient à la narration. Il ne cherche pas à expliquer l’inexplicable, ni à le justifier. Il montre avec virtuosité et talent comment cette bulle s’est formée et a explosée.
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Probablement le meilleur livre sur le mouvement de Mai 1968, assurément un incontournable. Il ne donne ni leçon, ni conclusion. Il montre une chose bien plus capitale : La convergence des événements qui peuvent mener à de tels égarements.
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Le livre a été primé en Allemagne. Il a reçu en 2015, le prix Deutcher Buchpreis, équivalant du prix Goncourt.
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Sa traduction a été assurée par Olivier Mannoni. Une deuxième prouesse.
Le traducteur a su mettre dans la langue de Molière, toutes les subtilités et les précisions que la langue allemande permet. Les virtuosités de l’auteur se retrouvent dans cette traduction.
Collection Terre Humaine
April 27, 2018
Collection Terre Humaine, Editions Plon
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Terre Humaine est une collection des éditions Plon fondée en février 1954 par Jean Malaurie. Terre Humaine a publié à ce jour une centaine de titres, dont une vingtaine, au moins, sont considérés, dans le monde, comme de grands classiques.
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Jean Malaurie a voulu donner la parole aux minorités, aux « populations de culture orale, dont la parole est confisquée », faire une place au récit à la première personne, accueillir des textes « sans souci de classe, de discipline et de clocher ».
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« J'ai voulu casser la barrière entre ceux qui savent et les autres, rendre le bonheur de comprendre accessible à tous. Et rétablir cette part de sensibilité première, cette vérité du "je" et de l'intime si méprisée de nos savants au nom de l'objectivité scientifique. »
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« Je ne veux pas que l'Histoire soit une addition de ghettos, mais de rencontres. » Et, dans cet esprit, il a ouvert sa collection à des ouvrages d'explorateurs et d'ethnologues, à des témoignages des milieux paysans et ouvriers, à des œuvres de la tradition orale, à des textes peu connus de grands auteurs comme Zola, Ramuz ou Segalen, à des livres de combat ou d'indignation.
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J'ai découvert cette collection, à l'age de mes 20 ans. J'ai ouvert la porte d'un monde qui m'était inconnu. Ces autres que souvent on montre en photo comme objet de curiosité ou de foire. Ces civilisations négligées et non reconnues. Après, j'ai regardé, j'ai écouté autrement. Mon premier livre fut "les yeux de ma chèvre" d'Eric Rosny. A cette date, j'habitait au Cameron, lieu de ce livre. De fils de forestier, je suis devenu camerounais.
Cette collection, sans bruit, sans fracas, continue son travail d'humanité. Elle est enregistre les traces de cette diversité qui fait la richesse de l'homme.
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A lire, et à avoir dans toute bonne bibliothèque.
Eugenia, Lionel Duroy, Julliard
April 13, 2018
Eugenia, Lionel Duroy, Julliard
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À la fin des années trente, parce qu'elle est tombée sous le charme d'un romancier d'origine juive, Eugenia, une jeune et brillante étudiante roumaine, prend soudain conscience de la vague de haine antisémite qui se répand dans son pays. Peu à peu, la société entière semble frappée par cette gangrène morale, y compris certains membres de sa propre famille. Comment résister, lutter, témoigner, quand tout le monde autour de soi semble hypnotisé par la tentation de la barbarie ?
Avec pour toile de fond l'ascension du fascisme européen, ce roman foisonnant revient sur un épisode méconnu de la Seconde Guerre mondiale, l'effroyable pogrom de Jassy. Portrait d'une femme libre, animée par le besoin insatiable de comprendre l'origine du mal, ce livre est aussi une mise en garde contre le retour des heures les plus sombres de l'Histoire.
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La critique encense le livre, mais certains s’égarent.
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« Dans la tête des hommes et dans l’histoire des nations, Lionel Duroy cherche les clefs de la haine de l’autre et sonde l’impensable. Les familiers de l’auteur retrouveront sa sensibilité, ses motifs – la famille, l’amour, le désir, le mal, la mémoire, l’écriture – et une liberté de questionnement qui s’attaque à l’immense sujet, cette banalité du mal, ce cœur maléfique, "the vicious heart" dont parlait l’américain Meyer Levin. »
Alice Ferney - Le Figaro Littéraire
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Certains critiques y voient un captivant roman historique. D’autres, de la grande et bonne littérature populaire.
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Bien pauvre jugement. Ce livre est plus que cela. Ceux qui n’y ont vu qu’un roman historique et de la littérature populaire, n’ont pas appréhendé (ou refusé) la dimension de ce livre.
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De quoi parle-t-il ? D’un massacre de 13.500 juifs à Iasi, capitale culturelle de la Roumanie. Ce drame a eu lieu en juin 1941, la Roumanie venait de rejoindre l’Allemagne dans la deuxième guerre mondiale. En Juin 1941, les camps de la mort n’existaient pas, les Einsatzkommandos n’avaient pas encore commencé leurs exécutions de masse en Ukraine, en Biélorussie, ... Les Roumains venaient de montrer l’exemple. L’ordre émanait directement du chef d’état roumain, Ion Antonescu. Il fut exécuté par la police roumaine avec l’aide d’une grande partie de la population.
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Lionel Duroy, nous plonge dans ce fait clé de la seconde guerre mondiale. La ligne de l’horreur avait été franchie. On connait la suite…
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Nous ne sommes pas dans un roman historique ou populaire, mais dans une interpellation. Ce livre nous bouscule, nous rappelle à l’ordre. Les hommes peuvent devenir immondes, des êtres à détruire. La phrase a un double sens. Celui que le gouvernement roumain attribuait aux juifs, celui que nous devons donner à toute personne participant à une telle barbarie.
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Mais la dimension de ce livre ne s’arrête pas à la prise de conscience de cet événement. Il y a un détail qui compte, qui est crucial. Ce sujet est tabou. En Roumanie, et particulièrement à Iasi.
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Dans les années 1990 et 2000, je suis allé à de nombreuses reprises, dans cette ville. J’ai aimé cette bourgade, ses rues, ses maisons. J’ai un attachement pour cette capitale culturelle. Les traces de la communauté juive y sont toujours présentes. Tout n’a pas été effacé ou détruit. Mais de juifs il n’y en a plus ou si peu. Si vous évoquez ce massacre de juin 1941, vous vous faites insulter. On vous traite de menteur. 13.500 morts ; on vous dit que vous délirez. Quelques centaines, peut être mille, vous répond-on. Malaparte évoque ce drame dans son livre « Kaputt ». C’est un romancier, m’a-t-on dit !
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En 1948, à Bucarest, Matatias Carp publia, un livre documentaire sur ce massacre. « Cartea Neagra, la Shoa sans allemand ». Le livre fut interdit en Roumanie. Il ne fut réédité qu’en 1998, mais il n’est pas présent dans les librairies roumaines.
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En 1997, Pierre Bachet, écrivain français d’origine roumaine, (son père venait de Iasi), écrit « Conversation à Iasi ». Il raconte son voyage, en 1996, dans cette ville. Il va sur les pas de son histoire familiale. Il rencontre la ville et ses gens. Il cherche. Puis il prend le train, il rentre. Les larmes sont là . Il sait qu’il ne reviendra jamais. Il a compris que ce passé a disparu, rayé, effacé. Il n’a pas existé. Sans jugement, sans besoin de justice, avec des mots simples, il pleure cette négation.
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Le tabou est toujours présent. De ce massacre, à Iasi, il ne faut toujours pas en parler, Une stèle commémorative a été installée. Timide et discret monument. Mais il est impossible de faire admettre l’apport culturel de la communauté juive à cette ville. A la faculté d’histoire, on vous parlera de la Grande Roumanie, d’un peuple pur : les Moldaves. Les juifs, qui représentaient 20% de la population, pas un mot. Pas une ligne dans les livres d’histoire.
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A la fin de la guerre, il y a eu un procès pour crime contre l’humanité. Il s’est tenu à Bucarest. 15 personnes ont été condamnées à de la prison. Mais au procès de Nuremberg, aucun roumain ne fut parmi les rangs des coupables…
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Le livre de Lionel Duroy met les pieds dans le plat. Il rappelle un indicible comme le disait Simon Wiesel. Dans son livre, il n’y a pas d’emphase, d’effets de style, de jeux de mots, juste les faits.
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Parler d’Eugenia comme d’un roman historique ou d’un roman populaire, c’est absurde. Cela vient à dire que Guernica n’est qu’un génial gribouillage de Picasso. Pourquoi Lionel Duroy a emmené sa plume sur un tel sujet. Il le dit : "Le déclencheur de cela c'est le croc en jambe de cette journaliste hongroise au père qui courait avec son enfant dans les bras. Des migrants étaient poursuivis par la police, ils couraient et il y a père, qui porte son jeune enfant dans les bras et là on voit une femme faire un croc en jambe à cet homme, on voit le petit garçon tomber. Je me souviens très bien du choc que m'a causé cette image et je me suis dit qu'on commençait à oublier comment la haine et la terreur étaient arrivées chez nous",
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Nous sommes bien loin du roman historique, ou d’une prose populaire, …
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Le capital Van Gogh,Wouter van der Veen, Actes Sud
April 06, 2018
Le capital Van Gogh,Wouter van der Veen, Actes Sud
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Vous croyez tout savoir ou presque sur Van Gogh ? Alors dépechez vous de lire ce livre.
Vous découvrirez avec surprise que Van Gogh, pauvre, marginale, artiste non reconnu, clochard céleste. Tout cela n'est qu'une vaste blague. Servant de réconfort à nombre d'artistes d'aujourd'hui, pensant que la seule voie de l'artiste est de grimper un mont de Golgotha.
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L'auteur n'est pas le premier venu. C'est son sixième livre sur ce peintre. Il est le directeur scientifique de l'institut Van Gogh. Bref un spécialiste reconnu et patenté de ce peintre.
La réflexion de l'auteur ne s'arrête pas au cas Van Gogh. Il commente le monde l'art contemporain. A la lecture de son livre, il va y avoir des grincements de dent chez les galeristes, les foires d'art, et chez nombre d'artistes.
En premier lieu, il refute l'idée, devenue concept, que pour être artiste il faut être galérien. Etre pauvre, alcoolique, drogué, asociale, ne sont en rien les caractéristiques qui font d'un individu un artiste. Pour lui cette complainte n'est là qu'un artefact cachant la réalité.
Il pose une autre question : Un artiste peut il l'être sans talent technique, sans la maîtrise d'un procédé ? L'artiste ne peut il être que conceptuel ?
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Un livre intéressant, bousculant l'ordre établi dans l'art contemporain
A lire, au minimum pour cesser de dire des bêtises sur Van Gogh.
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Kala Ghoda, Poèmes de Bombay, Arun Kolatkar, Gallimard
March 10, 2018
"Kala Ghoda, Poèmes de Bombay", Arun Kolatkar, Gallimard
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Qui mieux que Laettitia Zecchini, pour paler de ce poète indien. Elle en a lu la poésie dans sa langue d'origine et en a assuré la traduction.
"Peut-être traduit-on aussi par amour. Je veux dire qu’on peut rencontrer une œuvre comme on tombe amoureux, par éblouissement et aussi par hasard – ce hasard que Kolatkar évoque dans un passage de ses carnets en parlant du poème comme d’une bouteille à la mer. Qu’importe le temps mis pour rejoindre un rivage ou un destinataire. Le rôle du traducteur n’est en fin de compte que de rendre possible cet « étrange dialogue » qui s’instaure de poète à poète et de poète à lecteur, à des kilomètres ou des siècles d’écart : « ce que tu me dis peut mettre un millénaire pour me parvenir » écrit le poète citant aussi Mandelstam qui aura mis soixante ans pour le rejoindre en traduction et faire partie de son univers. Le désir de traduire Kolatkar est donc né de la certitude d’avoir découvert une merveille, un « secret » à partager avec le plus grand nombre. C’était une journée d’août 2003, dans une bibliothèque à Delhi, où je passais alors des journées entières à feuilleter des anthologies de poésie indienne contemporaine, cherchant des poètes qui me plairaient assez pour leur consacrer une thèse. Et puis le regard se pose sur quelques vers, et soudain une voix sonne juste".
Laetitia Zecchini, La Republique des livres, 11/10/2013
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A mi-chemin entre blues et poésie dévotionnelle de l'Inde médiévale, la poétique de Kolatkar puise son inspiration dans la poésie d'ici et d'ailleurs et s'organise en réseaux de correspondances où le local s'encastre harmonieusement dans l'universel et vice versa. Le résultat est jubilatoire, inventif et évocateur, comme le sont les clichés réimaginés qui ponctuent les 28 poèmes de ce recueil singulier : « la reine du carrefour aux pieds nus », « Notre-Dame-des-Fleurs-Mortes » ou encore « cantique des ordures »...
Tirthankar Chanda, Rfi, 21/02/2014
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Marc Pautrel, Editions Gallimard
February 22, 2018
Marc Pautrel,
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Marc Pautrel est un auteur inconnu, mais qui ne va pas le rester. Je l'ai découvert grace à une émission télé, où Christine Angot en faisait les louanges. Comme quoi, il arrive à celle-ci de ne pas dire des sottises.
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Cet homme, discret de nature, a déjà écrit 7 romans. Il se définit comme un individu se consacrant entièrement à l'écriture. Chez lui, elle est une nécessité semblable à la respiration. La lecture de son carnet (http://www.marcpautrel.net/carnet.html) confirme ce besoin. Il lui faut assembler les mots, comme un peintre va saisir un croquis, un musicien ecrire quelques notes pour fixer la mélodie d'un instant.
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Mais ce besoin se suffit-il ? Non. Avec Marc Pautrel, il est accompagné d'un talent incontestable. Une maîtrise de l'harmonie et de la musicalité des mots. Il est une des plus belles plumes de la langue française. Dans son écriture, pas d'effets de manche ou d'expressions marketées, juste un style magnifique. Pas par sa flamboyance, mais par sa mélodie et son élégance.
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Un auteur, artiste du français, à découvrir au plus vite.
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"Le Gazouillis des éléphants", Bruno Montpier, Editions du Sandre
February 01, 2018
"Le Gazouillis des éléphants" Bruno Montpier, Editions du Sandre
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Voilà un drôle de titre pour un livre. De quoi s'agit-il ? Un roman loufoque ? Un recueil de poésie. Non ! Loin de là . C'est un annuaire. Un d'une espèce rare et précieuse, que tout amateur d'art, d'architecture, ou d'humanité se doit d'avoir.
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Un annuaire qui recense tous les "palais idéaux des facteurs Cheval" en France. Tous ces bâtiments, ces lieux nés de l'imagination d'hommes un peu fous et libres. Autodidactes, doux dingues ou ouvriers en retraite, ils peuplent leurs modestes jardins de créatures chimériques ou de formes inédites. Démarche fascinante dont la réalisation la plus connue est le Palais Idéal du Facteur Cheval.
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Le Gazouillis des éléphants est le premier inventaire général des lieux de ce type en France ; Bruno Montpied en a recensé, en trente ans de vagabondages assidus, plus de 300.
À la fois réjouissant livre d'images (plus de 1000 photographies couleur et noir & blanc) et guide de voyage (les sites sont classés par région et département) à travers la France insolite, Le Gazouillis des éléphants est aussi un ouvrage de référence dans le domaine de l'art brut.des arts.
"Vie de Joseph Roulin" Pierre Michon, Editions Verdier
January 25, 2018
"Vie de Joseph Roulin" Pierre Michon, Editions Verdier
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Qui connait Joseph Roulin ? Bien peu de gens. Pourtant cet homme, modeste facteur à Arles dans les années 1880, a une double chance.
La première, Vincent Van Gogh réalisa 6 portraits de ce facteur et 6 portraits de sa famille (femme, et enfants). Un cas unique dans l'oeuvre de Van Gogh.
La deuxième chance, Joseph Roulin est le sujet de ce livre écrit par Pierre Michon.
Qui peut se vanter d'avoir son portrait réalisé par un peintre devenu mythe, et par une des plus belles plumes de la langue française.
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Dans ce court livre de 80 pages, on découvre tout le talent de Pierre Michon, la magie de sa plume.
Avec érudition et un français d'une rare qualité, l'auteur nous fait vivre cette rencontre entre Van Gogh peintre inconnu à cette époque, marginal et Joseph Roulin facteur, républicain tendance anarchiste.
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" J’ai voulu le voir en deçà de l’œuvre ; par les yeux de quelqu’un qui ignore ce qu’est une œuvre, si ce phénomène était encore possible à la fin du siècle dernier ; quelqu’un qui vivait dans un temps et dans un milieu où la mode n’était pas encore que tout le monde comprît la bonne peinture : ce facteur Roulin qui fut l’ami d’un Hollandais pauvre, peintre accessoirement, en Arles en 1888."
Pierre Michon
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Que dire de ce livre ? Vous y ferez deux rencontres. Van Gogh, l'homme et non le mythe . Tel qu'il était perçu à son époque, considéré comme un fou, et accessoirement peintre. Pierre Michon, une des plus belles plumes de la langue française, un Van Gogh des lettres, marginal, peu connu , mais qui comme ce peintre il rentrera dans l'histoire des arts.
"Plaisir et Toucher" Gilles Lipovetsky, Editions Gallimard
October 26, 2017
"Plaisir et Toucher" Gilles Lipovetsky, Editions Gallimard
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Le désir de plaire et les comportements de séduction semblent atemporels, depuis que des espèces se reproduisent par voie sexuelle. Néanmoins, l'hypermodernité libérale marque une rupture majeure dans cette histoire millénaire, tant elle impose à nos sociétés la généralisation de l'ethos de séduction et la suprématie de ses mécanismes.
Le mot d'ordre ne paraît plus être de contraindre, ordonner, discipliner, réprimer, mais de «plaire et toucher». La visée du théâtre classique selon Racine est désormais l'une des grandes lois, partout à l'œuvre, dans l'économie, les médias, la politique, l'éducation.
L'économie consumériste sature d'offres commerciales attractives notre quotidien, dominé par l'impératif de captation des désirs, de l'attention et des affects ; le modèle éducatif s'élabore sur la compréhension, le plaisir, l'écoute relationnelle ; dans la sphère politique, l'heure n'est plus à la conviction par la propagande, mais à la séduction par la vidéocommunication, parachevant la dynamique de sécularisation de l'instance du pouvoir.
La séduction-monde a provoqué l'émergence d'une individualisation hypertrophiée du rapport à autrui – ultime manière d'agir sur le comportement des hommes et de les gouverner, ultime figure du pouvoir dans les sociétés démocratiques libérales.
"Traité de Miamologie" par Stéphan Lagorce et l'équipe de 180° aux Editions 180°
October 26, 2017
"Traité de Miamologie" par S. Lagorce et l'équipe de 180° aux Editions 180°
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La miamologie (de l'onomatopée "miam" et du suffixe "logie"., désigne l'ensemble des disciplines nécessaires aux gourmands.
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Tout ce qu'il faut savoir pour dompter les petites et grandes difficultés de la patisserie. Avec générosité et gourmandise.
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Tout pour devenir un miamologue expert.
"La Bosco" de Julie Mazzieri aux Editions Corti
October 26, 2017
"La Bosco" de Julie Mazzieri, aux Editions Corti
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"La Bosco est un roman drôle et intrigant. Le titre est à lui seul une énigme. Est-ce un nom de famille, d’oiseau ? un nom de lieu, de pays ? À travers les paysages de neige québécois, près du village de Chester, un père fuit l’enterrement de sa femme. En quelques scènes, courtes et percutantes (pas de chapitres, ni de parties proprement dites), l'auteur arrive à faire vivre, dans la nuance, l’impasse à la fois sociale, morale et intime dans laquelle tombe chaque personnage à la mort de Suzanne... Cette oscillation entre le grotesque et le sublime fait toute la force du récit de Julie Mazzieri. Elle fait naître le rire le plus délicat, rapprochant La Bosco du conte merveilleux ou de la fable, là où les hommes ne sont pas si éloignés du monde animal, en l’occurrence des oiseaux." Jeanne Bacharach, 26/09/2017 - Revue en attendant Nadeau.
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Lors de la rentrée littéraire, on cherche toujours la perle oubliée par les critiques littéraires. On fouille, on découvre, on lit. Puis si la chance est là , on pousse un cri. On l'a trouvée ! Ce livre rentre dans cette catégorie. Sa qualité est là . Tant l'histoire que l'écriture. A tel point que le Prix Médicis a décidé de le rajouter à sa liste. In-extrémiste, au dernier moment. Idem pour le Prix Welper.
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L'auteur, canadienne d'origine, n'est pas prolifique. C'est son deuxième roman. Pourtant son premier livre (Le discours sur la tombe de l’idiot), publié en 2009, avait reçu le Prix du Gouverneur Général, l'équivalent du Prix Goncourt au Canada. Loin de se précipiter pour nous offrir un nouveau titre, elle a pris le temps, 8 ans, pour nous proposer ce nouveau roman. Une histoire courte, où avec virtuosité et précision, l'auteur nous embarque dans son histoire. Je tiens enfin ma madeleine littéraire de cette rentrée 2017 !
"Le travail est l'avenir de l'homme" de Nicolas Bouzon aux Editions de l'Observatoire
October 26, 2017
"Le travail est l'avenir de l'homme" de Nicolas Bouzou, aux Editions de l'Observatoire
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"Non, le travail n’est pas près de disparaître ! À chaque période de mutation de l’économie, les craintes sur la fin du travail resurgissent. Beaucoup d’entre nous pensent que le numérique, la robotique et l’intelligence artificielle menacent nos emplois.
Ces craintes sont infondées : aucun chômage dans le monde n’est aujourd’hui lié à l’utilisation des nouvelles technologies qui, bien au contraire, constituent un fantastique vecteur de progrès et d’emplois ! À condition de faire du travail humain une question intellectuelle et politique prioritaire, et de trouver enfin le courage de réformer en profondeur notre marché du travail et notre système de formation, seuls coupables du chômage de masse que connaît la France.
Ne laissons pas nos sociétés se transformer en colonies d’esclaves humains désargentés et malheureux. Et jouons au plus fin avec l’intelligence artificielle : elle ne sait pas que, tant que l’homme travaillera, c’est lui qui sera le maître du monde… !"
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En ces temps de réforme du code du travail, de révolution avec l'intelligence artificielle, beaucoup de gens se pose la question de la place de l'homme dans cette société du futur. L'auteur, sans polémique, nous éclaire de son point de vue. Sans vindicte politique ou aveuglement devant l'avènement de l'IA, ses propos restent logiques. Pas de catastrophisme ou d’angélisme, juste du bon sens. Il s'appuie sur l'histoire et redonne à la politique le role qu'elle se doit d'avoir. Réaliste face aux évolutions indispensables de notre société qu'induisent ces mutations technologiques, il reste optimiste. Son diagnostique est simple, et bien posé. Ses solutions se résument en une croyance en l'homme, le passé l'ayant toujours démontré.
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Un livre intéressant à lire. Il répond avec simplicité et bon sens, à une de nos inquiétudes de demain : Que va devenir le travail ?
"Jérusalem" de Alan Moore aux Editions Inculte
October 19, 2017
"Jérusalem" de Alan Moore, aux Editions Inculte
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Le livre impressionne par son aspect. Une couverture faite de signes cabalistiques. Un pavé de plus de 1200 pages. Puis le titre choisi "Jérusalem". Il faut oser le choisir. Donner à un roman le nom de cette ville sainte, de ce lieu sacré pour les 3 religions du livre, zone de tant de conflits, croisement des fois et des pouvoirs spirituels. Le cadre est donné. Nous sommes loin, très loin d'un roman de gare.
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Oeuvre quasi chamanique, l'auteur fait de sa ville, Northampton, ville de 200.000 habitants à 250 km au nord de Londres, sa Jérusalem. Il en fait un lieu de fois et de déperditions. Il décrit les marchands du temples, les espoirs, les utopies, les errances des habitants. Il l'a fait centre du Monde, de notre monde. Il en fait le miroir de notre société.
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Livre épique, brillant, étourdissant, nous sommes devant un chef d'oeuvre littéraire. 1200 pages à lire. Ce n'est pas un long fleuve tranquille, mais un rare moment de folie littéraire. L'auteur a mis dix ans pour écrire son roman. Il en a choisi avec soin chaque mot, chaque virgule, chaque expression. Vertigineux !
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Le résumer à un extrait. C'est impossible. C'est lui faire offence. Peut-on résumer Jerusalem en une pierre ou un cliché ? Il faut le lire.
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"Made in China" de Jean-Philippe Toussaint aux Editions de Minuit
October 12, 2017
"Made in China" de Jean-Philippe Toussaint, aux Editions de Minuit
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Quand un auteur français confirmé rencontre son éditeur chinois, cela donne un livre savoureux. La découverte de ce pays où le Lettré demeure, encore de nos jours, l'homme idéal. Son éditeur chinois en est le parfait exemple. Erudit, fan de Robbe-Grillet, il étonne par sa culture et ses réparties. Confucius n'est jamais très loin. On part dans un voyages à travers la Chine, où Jean-Philippe Toussaint, tel une enfant de 5 ans, ne parlant que quelques mots, accompagné de son éditeur devenu guide, s'étonne, s'émerveille, et nous fait rire.
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Un livre brillant, vertigineux, ludique, dans un français élégant.
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Extrait :
"À propos de chaussures, Chen Tong m’a raconté un jour qu’un de ses professeurs aux Beaux-Arts trouvait que l’évolution des arts plastiques, c’était comme l’évolution des vêtements, et que l’évolution de la littérature, c’était comme l’évolution des chaussures. Les vêtements changent très rapidement, de forme, de matière, de taille, de couleur, mais, pour les chaussures, les changements possibles sont beaucoup plus limités. Mais toi, me disait Chen Tong, comme Robbe-Grillet, tu as trouvé une manière différente de faire des chaussures."
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"Encore vivant" de Pierre Souchon aux Editions du Rouergue
September 21, 2017
"Encore vivant" de Pierre Souchon, aux Editions du Rouergue
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Un premier roman d'un journaliste confirmé.
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Des pages fortes, flamboyantes, humaines sur sa maladie, sa bipolarité. Il est désespéré et fragilise mais il ne s’effondre pas. Il est plein de vie. Il a attendu ses 35 ans, pour mettre en phrase ce compagnon trop présent que Winston Churchill nommé "mon chien noir". C'est l'occasion d'un retour vers son père. Un dialogue intime entre un paysan cévenole et son fils devenu "intello-bourgeois parisien". Des pages qui sont des fulgurances littéraires.
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"14 Juillet" d'Eric Vuillard, aux Editions Actes Sud
July 13, 2017
"14 Juillet" d'Eric Vuillard, aux Editions Actes Sud.
La prise de la Bastille est l’un des évènements les plus célèbres de tous les temps. On nous récite son histoire telle qu’elle fut écrite par les notables, depuis l’Hôtel de ville, du point de vue de ceux qui n’y étaient pas. 14 Juillet raconte l’histoire de ceux qui y étaient. Un livre ardent et épiphanique, où notre fête nationale retrouve sa grandeur tumultueuse.
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Au fond, il n'y a pas de petites gens. Et s'il y en a, ils sont capables de choses inouïes. Chaque nouveau récit d'Eric Vuillard nous le rappelle. L'auteur nous a appris, avec Congo (2012), La Bataille d'Occident (2012) ou Tristesse de la terre (2014), à regarder autrement ces héros malgré eux, ces hommes ou femmes qui font l'Histoire avant d'être dévorés par elle, jusqu'à l'oubli. Avec 14 juillet, il ne trahit pas cet engagement. Cette prise de la Bastille, la République l'a érigée en mythe, mais où sont passées la chair, la poussière sous les semelles, la peur au ventre de celles et ceux qui l'ont faite ? Reprenons l'assaut depuis le début. En partant des jardins de Versailles, parmi les gueuses et les gueux qui, sans y croire peut-être, sans le savoir sûrement, allaient faire basculer le destin du pays — et de l'humanité. Michelet ou Lavisse nous ont laissé les portraits des « grands » hommes ? Vuillard donne un nom aux petits. Comment s'appelaient-ils, d'ailleurs ? « Ce jour-là , à la Bastille, il y a Adam, né en Côte-d'Or, il y a Aumassip, marchand de bestiaux, né à Saint-Front-de-Périgueux, il y a Béchamp, cordonnier, Bersin, ouvrier du tabac, Bertheliez, journalier, venu du Jura, Bezou, dont on ne sait rien, Bizot, charpentier, Mammès Blanchot, dont on ne sait rien non plus, à part ce joli nom qu'il a et qui semble un mélange d'Egypte et de purin. » Des riens du tout, des invisibles, des intouchables, des « pauvres filles venues de Sologne et de Picardie, [...] mordues par la misère et parties en malle-poste, avec un simple ballot de frusques. Nul n'a jamais retracé leur itinéraire de Craponne à Paris [...]. Nul n'a jamais écrit leur fable amère. »14 juillet leur rend justice. Et nous fait bondir de 1789 à 2016, d'une incise l'autre, de cette petite voix discrète qui, à intervalles réguliers, vient nous dire : « Hier, c'est aujourd'hui ! », et qui est aussi la signature de Vuillard. Car ces individus sans droits, qui ont ébranlé un régime archaïque et donné un nouveau « sens » à l'Histoire, nous parlent. Ils auraient pu se briser les poings sur la pierre de la Bastille, ils nous laissent la liberté et l'égalité en héritage. Et l'idée que ce qui a été fait une fois... Comme d'habitude, Eric Vuillard n'entre pas par effraction dans l'esprit de ses « héros ». Il ne leur invente pas des motivations, ne leur dresse pas de stèle. Il raconte simplement, avec un talent fou, les hésitations, mais aussi la trouille, la générosité et le grain de folie de ces « ci-devant » du 14 juillet — ses soeurs et ses frères, et finalement les nôtres aussi. — Olivier Pascal-Moussellard - Télérama 2016.
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Ce livre nous plonge dans cette France des gens ordinaires, de ceux qui ne parlent pas. De ceux qui ne sont rien pour certain. Un jour, ils se réveillent, ils se soulèvent. Il font entendre leur bruit et leur fureur. Ils montrent que ces "sont rien" font l'histoire de France. Que les autres, pour exister, ne font que suivre les aspirations de ces "sont rien".
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Roman, pages d'histoire, Eric Vuillard nous fait vivre en direct ce moment de basculement historique. Il nous amène à réfléchir sur notre rôle de citoyen. Il donne une leçon de politique. Le peuple subit, mais gare au jour où il dit stop.
"Personne ne gagne" de Jack Black, aux Editions Monsieur Toussaint Louverture
June 30, 2017
"Personne ne gagne" de Jack Black, aux Editions Monsieur Toussaint Louverture
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« Près d’un siècle après sa première parution aux États-Unis, ce récit autobiographique signé Jack Black, voyou de haut vol et clochard pas si céleste que ça, reflète une force et une fraîcheur (pour ne pas dire une modernité) quasi miraculeuses. Ce formidable livre d’aventures, digne d’un Jack London, nous entraîne, au-delà du destin de ce fascinant bandit de grand chemin, dans le monde sidérant des rebelles et des tricards d’une Amérique fin de siècle en pleine mutation. »
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« Il flotte aujourd'hui encore dans ce grand livre une liberté et un refus des conventions salutaires. Et il demeure le témoin nostalgique d'une époque revolue. »
L'Humanité Dimanche
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« Épopée cahoteuse d'un aventurier incorrigible, émaillée de déconvenues sordides et de figures inoubliables. Antihéros par excellence, il ne choisit pas la liberté : c’est elle, la garce, qui fait de lui son jouet, jusqu’à une improbable rédemption. »
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La liste des critiques élogieuses est longue. Pourtant ce n'est que l'autobiographie d'un voleur. Il n'est pas un héros, ni forcément sympathique. Là n'est pas le but recherché. Son récit, c'est celui d'un homme qui a tout sacrifié non pour la liberté mais pour sa liberté. Voyou et clochard, il l'est dans la vie comme dans son écriture. Avec un style fait de violence et de sincérité. Voleur, flambeur, affranchi de toute convention, il nous emmène dans le road-movie de son existence. On en sort secouer.
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"Chute et ravissement" de Brigitte Fontaine, aux Editions Actes Sud
June 23, 2017
"Chute et ravissement" de Brigitte Fontaine, aux Editions Actes Sud
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Immobilisée à la suite d’une blessure, Brigitte Fontaine a profité de ce moment pour écrire un long poème d’amour adressé directement à Arthur Rimbaud, son idole.
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"Je ne lis plus Rimbaud, mon frère, je l’ai dans mon cœur". Brigitte Fontaine
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"Chute et ravissement n'est pas un poème, c'est un écrit comme vous et moi, c'est une longue lettre, une épitre sauvage si vous voulez, un salut adressés à un frère, un frère humain et inhumain et non une "idole" de l'auteur ou bien le joyaux de son "panthéon poétique" ; une lettre, un accompagnement, une étreinte dans le mitan entre le Très-Bas et le Très-Haut avec un frère qui se trouve se nommer Rimbaud, et aussi avec l'auteur même et avec et pour chacun et chacune d'entre nous." Brigitte Fontaine
L'univers de Brigitte Fontaine est présent dans chaque page. Fantasmagorique, lubrique, libertaire et heureuse. Est-ce un livre, un long poème, une déclaration d'amour, je ne le sais pas. Peut être un OLNI, un objet littéraire non identifié. Tous simplement la nouvelle oeuvre de cette artiste. A découvrir. Et vous surprendrez avec ce besoin incontrôlable de le relire.
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"Arthur
peux-tu nous aider à traverser la rue
nous sommes de vieilles dames vaincues
des vieillards surgelés
des bébés mort-nés
nous sommes la jeune fille et la mort
le jeune homme et la mort
Arthur
peux-tu
veux-tu nous aider
as-tu pu traverser ?"
Brigitte Fontaine
"En raison du vent" de Luo Fu, aux Editions Circé
June 16, 2017
"En raison du vent" de Luo Fu, aux Editions Circé
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Florilège de la création de toute une vie, qui a commencé dès les années 1940, le présent recueil aborde des thèmes variés : métaphysique, histoire chinoise, quête des racines, nostalgie, voyage en Russie et en Chine, vie à Vancouver... Les "poèmes au titre caché" ou acrostiches montrent son goût pour les recherches formelles. L'attachement à l'esthétique littéraire chinoise est évident : "Je suis le poète le plus moderne, mais aussi le plus chinois : le meilleur moyen de continuer la voie classique ou de poursuivre la tradition se fait par l'innovation, qui est mon but ultime", déclare Lo Fu.
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Luo Fu est un écrivain prolifique, auteur de plus d’une douzaine de recueils de poésie, de cinq volumes d’essais et de cinq ouvrages de critique littéraire. Né en 1928 à Hengyang au Hunan en Chine continentale, Lo Fu débarque à Taiwan avec le gouvernement nationaliste en 1949. Prenant pour premiers modèles les poètes modernistes chinois Feng Zhi et Ai Qing, mais également influencé par Baudelaire, Rimbaud, Valéry, Apollinaire, Lo Fu adhère à la mouvance surréaliste. Fasciné par Rilke, dont la profonde sensibilité religieuse l’inspire particulièrement, il lui rendra hommage dès La mort d’une cellule de pierre (1965) et jusque dans un recueil plus récent, Bois flotté (2000). Son œuvre se pare d’une sérénité, qui lui apporte la solitude et le détachement auxquels il aspire, se comparant lui-même au grand oiseau Peng de Zhuangzi, qui s’ébat en toute liberté. Surnommé le « démon de la poésie », Lo Fu a inspiré des générations d’écrivains à Taiwan et en Chine.
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Comment parler de cette poésie ? Laissons le poète faire. "Qu'on tende devant soi un miroir, on n'y verra pas l'image d'un homme contemporain, mais la cruauté de son destin.Ecrire de la poésie est une façon de se venger de la cruauté du destin" Luo Fu 1975.
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"Vous me demandez ce qu'est la poésie
Je dis qu'une fleur de pêcher est un soleil couchant
Si vous me redemandez
La poésie au bout du compte qu'est ce que c'est !
Tout à coup j'éprouve une sueur froide
Il y a même quelqu'un
pour dire que le sang que j'ai craché
Est une fleur de pêcher"
Luo Fu - 1970
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Lire ce recueil de poésie est une merveilleuse aventure dans l'esprit d'un érudit chinois. Mieux qu'un essai de philosophie, elle bousculera vos certitudes. Mieux qu'un roman, elle vous emportera dans un imaginaire. Il y a de 2500 ans, Confucius disait que la Chine est terre de poésie. Les siècles sont passés, avec leurs guerres, leurs révolutions; la Chine demeure terre de poésie. Luo Fu la cultive avec talent et sagesse . Il en produit des fruits rares et délicats.
"OUTSIDE" de Marguerite Duras, aux Editions P.O.L
June 02, 2017
"OUTSIDE" de Marguerite Duras,
aux Editions P.O.L
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« Vous voyez, quelquefois je faisais des articles pour les journaux. De temps en temps j’écrivais pour le dehors, quand le dehors me submergeait, quand il y avait des choses qui me rendaient folle, outside, dans la rue – ou que je n’avais rien de mieux à faire. Ça arrivait. » Marguerite Duras
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Outside rassemble une soixantaine de textes, suscités par des événements quotidiens, par l’actualité, écrits avec rapidité à la manière du journaliste, articles « provoqués du dehors » faits avec plaisir, alimentaires parfois.
"C'est d'un écrivain engagé et courageux qu'Outside donne le portrait : Marguerite Duras apparaît dans ce recueil d'articles dont la plupart furent donnés à France-Observateur comme une femme, non point enfermée dans sa tour d'ivoire littéraire et dans ses films, mais investie par le monde souvent atroce qui l'entoure : la guerre d'Algérie, la misère carcérale, le racisme, l'assassinat de Nagy…
Avec une passion frémissante et dépouillée de tout cri, mais où l'indignation perce à chaque mot, Marguerite Duras démasque derrière un fait brut, une actualité, un « chien écrasé » même l'hypocrisie sociale. Elle fait ressortir derrière ces interviews, ces questions directes, humaines, éclairantes, la détresse. Et ce message de compréhension, de fraternité qu'elle nous délivre, par sa sobriété, par la force de sa conviction, par sa ferveur, devient littéraire en quelque sorte, miraculeusement, acquérant ainsi un impact supplémentaire." Réforme, 15 décembre 1984
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Qui est Marguerite Duras ? Souvent on l'enferme dans "l'amant". On évoque le mythe littéraire. On parle de ses travers. On se souvient de sa voix, de ses lunettes. On oublie sa personnalité libre et complexe.
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Ce livre, regroupant une partie de ses écrits journalistiques, nous montre la vraie Duras. Engagée, étrangère au Paris mondain des Lettres, simple et si talentueuse. Sous sa plume, l'anecdote prend vie, devient consistance, interroge et bouscule.
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Lisez ce livre, vous ne pourrez qu'être émerveillé.
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http://remue.net/spip.php?article1407
"Les étoiles s'éteignent à l'aube" de Richard Wagamese, aux Editions ZOE
June 02, 2017
"Les étoiles s'éteignent à l'aube" de Richard Wagamese,
aux Editions Zoe
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Résumé :
Lorsque Franklin Starlight, âgé de seize ans, est appelé au chevet de son père Eldon, il découvre un homme détruit par des années d’alcoolisme. Eldon sent sa fin proche et demande à son fils de l’accompagner jusqu’à la montagne pour y être enterré comme un guerrier. S’ensuit un rude voyage à travers l’arrière-pays magnifique et sauvage de la Colombie britannique, mais aussi un saisissant périple à la rencontre du passé et des origines indiennes des deux hommes. Eldon raconte à Frank les moments sombres de sa vie aussi bien que les périodes de joie et d’espoir, et lui parle des sacrifices qu’il a concédés au nom de l’amour. Il fait ainsi découvrir à son fils un monde que le garçon n’avait jamais vu, une histoire qu’il n’avait jamais entendue.
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"Un grand roman, marquant, qui écorche et qui répare tout à la fois. On en garde le souvenir près de soi comme un talisman. Peut-être aurait-il d’ailleurs mérité qu’on lui conserve son titre original : Medecine walk ." Guillaume Bourain, Librairie Les Saisons (La Rochelle)
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Un livre simple, sans effets de manche. Des dialogues secs, abrupts, sans clichés. Un roman qui sonne juste, qui déborde d'humanité. Le livre que tout père aimerait écrire à son enfant.
"Elève" de Bruno Bayen, aux Editions Christian Bourgeois
May 26, 2017
"Elève" de Bruno Bayen,
aux Editions Christian Bourgeois
"l'ultime roman d'un écrivain-dramaturge-metteur en scène mort il y a juste quelques semaines, avant même que ne paraisse le plus autobiographique de ses récits. Impression de pénétrer dans les secrets les mieux enfouis de l'artiste si discret et pudique, tels la famille provinciale d'intellectuels grand bourgeois, la fratrie cruelle, la cousine, la mère un peu folle et le père féru de dictionnaires, de littérature, de traductions et de traités d'éducation... A travers Elève, on redécouvre un Bruno Bayen (1950-2016) plein d'humour. On croyait connaître un peu l'ex-normalien germaniste, grand rêveur de théâtre et organisateur de spectacles cérébraux et oniriques... On retrouve dans Elève, de l'origine des sentiments et des choses, de l'identité et des êtres... Les bonheurs d'écriture d'Elève croisent, comme dans les spectacles qu'imaginait Bayen, des mystères indéchiffrables. Ce livre a leur rare parfum." Fabienne Pascaud - Telerame 1 Mars 2017.
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Décrire ce livre n'est point chose aisée. Autobiographie, balade d'érudit, roman comme l'auteur aurait aimer à le dire. Je ne sais quoi choisir. Assurément, il y a de l'esprit, de l'érudition et même du rire. L'auteur nous entraîne dans son enfance, dans son univers, dans le peuple de son esprit. On n'y trouvera pas de moment pagnolesque, ni d'aventures à la Mark Twain . Juste une élégance faite de simplicité et d'érudition.
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Un livre pas toujours facile d’accès, qui ravira les amoureux du beau français et séduira les érudits.
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"La grève" de Ayn Rand, aux Editions Belles Lettres
May 18, 2017
"La Grève" de Ayn Rand,
aux Editions Belles Lettres
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Présentation par l'éditeur :
Pourquoi le monde semble-t-il se détraquer ?
Pourquoi, sans raison apparente, un sentiment de désespoir et de frustration se répand-il partout ?
Pourquoi, dans les pires moments, entend-on ce nom, sans visage et sans origine ?
QUI EST JOHN GALT ?
Roman d'énigme, roman philosophique, roman politique, La Grève (Atlas Shrugged) a été traduit en dix-sept langues et est le livre le plus influent aux États-Unis après la Bible.
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Présentations choisies parmi une multitude :
-"Une lecture édifiante car très actuelle." (Le magazine littéraire)
-Plus que l'épopée industrielle, chaotique et rageuse, qui sert de trame au roman, c'est la vigueur percutante de la langue qui fascine aujourd'hui. (Télérama)
-Pourquoi dans notre pays, un si long silence sur une telle Å“uvre ? (La Croix)
-En résumé, l'ultime roman d'Ayn Rand est la lecture obligatoire de tout Geonpi (le collectif des entrepreneurs français pigeonnés par le système) qui se respecte,... du cadre brimé ET de sa hiérarchie réduite au silence, de l'entrepreneur frustré et silencieusement rageux contre la machine (Rue89 Lyon - 28/10/2012)
-Il serait néanmoins difficile de comprendre les débats de société américains sans ce livre, qui a mis plus d'un siècle à nous parvenir. (Le Matricule des Anges - 01/11/2011)
-Paru en 1957 aux Etats-Unis, le magnum opus d’Ayn Rand a rapidement connu un succès retentissant. Roman foisonnant, structuré par une énigme dont l’ampleur se déploie sur des centaines de pages, La Grève est aussi l’expression la plus aboutie de la philosophie randienne : une exaltation de l’homme libre, digne car il ne doit rien à autrui, capable de sentiments authentiques, producteur car il est, in fine, celui qui porte le monde sur ses épaules. (Zinfos - 22/09/2011)
-Atlas shrugged (La grève), de Ayn Rand: éthique de l’intérêt personnel contre tyrannie du bien commun, un roman d’une actualité brûlante. (Le Blog de Philippe Silberzahn)
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Après ce livre, vous ne pourrez plus dire dire que l'Amérique est une nation d'incultes, sans fondement, sans culture. L'auteur, d'origine russe, philosophe et écrivain, a romancé à travers 1300 pages sa pensée. Au lieu de théoriser, elle développe sa philosophie sous la forme d'une épopée. Avec un personnage clé, John Galt, né de ses réflexions. Le livre écrit en 1957, est si dense, si puissant, qu'il a fallut plus de 50 ans avant qu'un éditeur ose se lancer dans sa traduction. Livre fleuve, ce n'est pas un cours d'eau tranquille. Il faut se jeter dans son bouillonnement et se laisser emporter par son courant. Quelque fois, il faut s’arrêter sur la rive, pour reprendre son souffle. Puis comme aspiré par cette force, vous jetterez à nouveau à l'eau. Vous voulez savoir qui est ce John Galt.
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Roman philosophique, oeuvre littéraire, essai politique, à chacun de décider. Certains haïssent ce livre. Ils vocifèrent, mais ils en ont lu et relu les moindres paragraphes. Ce texte ne peut laisser indifférent. Il se mérite. Mais une fois sa lecture finie, tous, vous vous poserez la même question : "Pourquoi ne l'ai je pas lu plus tôt ?"
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"Au paradis des fous" de Virion Graçi, aux Editions Gallimard
May 11, 2017
"Au paradis des fous" de Virion Graçi,
aux Editions Gallimard
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Tandis que son mari travaille clandestinement en Grèce, Lora tue son fils de huit ans, Tori, en lui plantant un clou chauffé au rouge dans le crâne parce qu'il écrivait à son père qu'elle recevait des hommes...
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Spiros, ce père et mari, universitaire, a du migrer en Grèce, pour tenter d'offrir une meilleure vie à sa famille. Exploité, méprisé, il loue ses bras pour un salaire de misère. Le drame survient. Il doit rentrer au pays. Sa femme serait devenue folle. Son fils est malade, peut-etre mort. Il n'a que des brides d'information. En Grèce, il avait oublié sa dignité, son nom. En Albanie, sa famille s'est disloquée. Son passé, il veut l'oublier. Mais il est là . On ne lui a pas tout dit, mais il pressent une vérité difficile. Sa vie est-elle en Grèce ? Il ne le sait pas. Son âme est toujours en Albanie. Il a tout perdu, mais il n'a rien oublié.
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Polar, roman, critique de la dictature communiste albanaise, difficile de classer ce livre. Il parle de ces hommes fuyants un enfer dans l'espoir d'un futur. Il raconte la vie de l'un d'entre eux qui a tout sacrifié, tout perdu, en voulant offrir une autre vie à sa famille. Ce roman écrit il y a plus de 20 ans, est toujours d'actualité. Témoin de ces pages sombres de l'Albanie communiste, il est devenu, malheureusement, message intemporel; l'histoire s'étant répétée en d'autres lieux.
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L'auteur, Virion Graçi est professeur d'anglais dans une université albanaise. Et l'été, pour compléter ses revenus, il fait le même périple que Spiros. De cette expérience est né ce récit, noir, sombre, dur, poignant. Le paradis des fous est un roman puissant, d'une écriture magnifique. C'est un chef d'oeuvre de littérature. Un de ses livres qui vous hantent.
"Manuel à l'usage des femmes de ménage" de Lucia Berlin, aux Editions Grasset
March 23, 2017
"Manuel à l'usage des femmes de ménage" de Lucia Berlin,
aux Editions Grasset
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Lucia Berlin, l'auteur, mariée trois fois, mère de quatre garçons, nous raconte ses multiples vies en quarante-trois épisodes. Élevée dans les camps miniers d’Alaska et du Midwest, elle a été successivement une enfant solitaire au Texas durant la Seconde Guerre mondiale, une jeune fille riche et privilégiée à Santiago du Chili, une artiste bohème vivant dans un loft new-yorkais au milieu des années 50 et une infirmière aux urgences d’Oakland. Avec un délicat mélange d’humour, d’esprit et de mélancolie, Berlin saisit les miracles du quotidien jusque dans les centres de désintoxication du sud-ouest des États-Unis, elle égrène ses conseils avisés et loufoques tirés de ses propres expériences d’enseignante, standardiste, réceptionniste, ou encore femme de ménage.
Dix ans après la mort de l’auteur, la découverte de Manuel à l’usage des femmes de ménage a constitué un événement littéraire majeur aux États-Unis, puis dans le monde entier.
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Il ne faut voir dans ce livre aucun misérabilisme, juste la vie étonnante de cette américaine. Pas d'aventure trépidante, de suspens haletant; juste son regard sur des faits simples qui s’enchaînent. Pas de leçon sociale, juste une vie comme tant d'autres, où elle magnifie les anecdotes, les rencontres. Avec un style bref et précis, elle nous emmène dans un monde digne d'Alice au pays des merveilles.
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Et comme nous dit une confrère libraire : "Mes très chères sœurs, mes très chers frères, quel gâchis que vous passiez à côté de ce pur miracle, tout près de cette femme qui s'est donnée sans compter à ses amours, à ses enfants et à tous les siens comme elle a donné à l'écriture tout ce qu'elle avait, sans illusion ni espoir de retour."
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Vous ne pourrez qu'aimer ce livre, qu'en garder un merveilleux souvenir. Vous le rangerez précieusement dans votre bibliothèque à fin de pouvoir le lire à nouveau et de le relire à nouveau.
"Terreur" de Ferdinand von Schirach, aux Editions de l'Arche
March 23, 2017
"Terreur" de Ferdinand von Schirach,
aux Editions de l'Arche
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Résumé :
Le 26 mai 2013, à 21h21, Lars Koch, major de l’armée de l’air, abat un avion de ligne détourné par un terroriste et prêt à s’écraser sur le stade de football de Munich. Il avait pourtant reçu l’ordre de ne pas tirer. Il est accusé d’avoir causé la mort des 164 passagers à bord de l’appareil pour sauver les 70.000 spectateurs présents dans le stade. Criminel ou héros ? Un cas de justice et de conscience.
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L'auteur allemand, avocat pénaliste, a déjà écrit deux livres («Crimes», «Coupables») qui l'ont placé parmi les grandes plumes de littérature allemande contemporaine. Ici il nous offre une pièce de théâtre percutante et dérangeante.
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Les parties s'affrontent. Le procureur veut accuser le pilote. Il n'a pas avoir obéi aux ordres, il a abattu l'avion avec ses 164 passagers. La défense tente de démontrer la sagesse de la décision du pilote. Elle a permis de sauver les 70.000 spectateurs du stade.
Deux conceptions de la morale s'opposent. Les plaidoiries sont magistrales. Les faits sont décrits avec précision. Les événements s’enchaînent. On vit l'accélération du temps. La crise est là . La tension est palpable. Qui est dans la vérité ? Où est la lâcheté ? Où est l'humanité ? Le pilote est-il un héro ou un criminel ? De quel coté se trouve la justice ? Le débat est intense, dur, froid. Chacune des parties est habile dans ses propos. Chacune des deux thèses est judicieusement développée. L'auteur ne donne pas de réponse. Il n'y a pas de conclusion. Le verdict n'est pas connu. Le jury, c'est vous. Lecteur, vous prononcerez votre sentence.
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Magnifique texte, qui ne pourra que vous bousculer. Le pilote est-il condamnable ?
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"Révoltée" d'Evguénia Iaroslavskaïa-Markon
March 23, 2017
"Révoltée" d'Evguénia Iaroslavskaïa-Markon
aux Editions Seuil
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L'autobiographie sans filtre d'une marginale russe, passionnée et romantique, qui brûla sa vie entre la révolution de 1917 et son exécution en 1931.
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Un document conservé dans les archives du KGB avant d'être exhumé il y a vingt ans.
Autobiographie écrit en captivité, ce texte sincère, direct, a été découvert en 1996 dans les archives des services secrets russes. « Je n'ai rien à perdre. Voilà pourquoi je suis sincère », écrit-elle juste avant de mourir, revendiquant sa fierté de faire partie des intellectuels asociaux.
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Evguénia est née en 1902. Elle est issue de la bourgeoisie intellectuelle juive de Saint-Pétersbourg. Elle vit en direct la révolution de 1917. Devenue militante, elle partage le sort des plus pauvres et rentre dans la clandestinité. Mais elle est lucide, très vite elle comprend que les bolcheviques ont volé la révolution. Ils sont à ses yeux des contre-Ârévolutionnaires instaurant une nouvelle dictature. Mariée au poète Alexandre Iaroslavskaïa, elle se marginalisera, préférant vivre parmi les voleurs et les prostituées, ceux-ci étant pour elle les vrais révolutionnaires. Elle sera animée d'une haine féroce à l'égard des tchékistes. Plusieurs fois arrêtée par la police d'Etat, elle sera déportée en Sibérie. En 1931, âgée de 29 ans, elle sera exécutée dans le camp des îles Solovki .
Son écriture est brute, directe, et dense. Elle écrit comme elle crache à la figure de ses bourreaux
Ses premiers mots : « Avertissement. Ne soyez ni étonnés ni troublés par ma sincérité. (…) J’écris pour moi. Ecrire pour falsifier la réalité n’a aucun intérêt. D’autant plus que je n’ai rien à perdre. Voilà pourquoi je suis sincère. »
Elle couche ses souvenirs à la volée, sur trente neuf feuillets. L'a-elle écrit en une seule journée? Un brouillon a-t-il précédé ce texte ? Personne le sait. L'écriture est propre, sans rature ni correction. De nombreuses fautes grammaticales sont présentes. Elle passe de l'argot au russe, au français à l’hébreu. Elle confesse ce patchwork en écrivant : «J'estropie à l'écrit les quatre langues que je possède: le russe, l'allemand, le français et l'hébreu.» Mais son écrit a du style. Elle a indéniablement un talent littéraire. Elle sait raconter les détails, transmettre un vécu, des ressentis. Il n'y a pas d'effets de manche, ou de bons mots, juste une énergie débordante de sincérité.
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"Le gang des rêves" de Luca di Fulvo
March 23, 2017
"Le gang des rêves" de Luca di Fulvo
aux Editions Slatkine et Cie
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Résumé :
Une Italienne de quinze ans débarque avec son fils dans le New York des années vingt...
L'histoire commence, vertigineuse, tumultueuse. Elle s'achève quelques heures plus tard sans qu'on ait pu fermer le livre, la magie Di Fulvio.
Roman de l'enfance volée, Le Gang des rêves brûle d'une ardeur rédemptrice : chacun s'y bat pour conserver son intégrité et, dans la boue, le sang, la terreur et la pitié, toujours garder l'illusion de la pureté.
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«Un livre comme un voyage dont on voudrait qu'il ne s'arrête jamais»
La Repubblica
«Plusieurs histoires se croisent dans ce livre merveilleux. Du rêve américain à l'histoire de l'immigration aux États-Unis, on a l'impression de plonger dans un film de Scorsese.»
Corriere della sera
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"« Le gang des rêves » est un livre monumental, tant par le nombre de pages, environ 700, que par la quantité d’histoires qu’il raconte et de personnages dont il suit les destins.
Le style fluide et captivant, presque cinématographique, en fait une lecture agréable, et les personnages, définis avec maîtrise et précision, vaudraient chacun un roman à part entière.
Mais il ne faut pas penser à un simple roman historique centré sur le « rêve américain ». Ici, comme dans tous les bons romans, on va au-delà de la contingence. Ici on parle d’immigration, d’intégration, d’apartheid, d’identité, de déterminisme social, de délinquance, mais aussi des pionniers de la radio, du côté obscur de l’industrie cinématographique, et surtout d’amour: amour maternel et amour contrasté, véritable colonne vertébrale du roman. "
Riccardo Borghesi
Extrait :
De toute façon, Cyril vient de découvrir que les Italiens ne sont pas des blancs, sourit Christmas, l'attirant à lui et l'embrassant. Cyril, toi et moi, nous sommes américains, un point c'est tout.
- Quel beau rêve!
- C'est la réalité, Maria! affirma-t-il avec détermination.
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Copie de -"La connaissance de la douleurl" de Carlo Emilo Gadda
March 16, 2017
"La connaissance de la douleur " de Carlo Emilo Gadda
aux Editions Seuil
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Commencé en 1937, publié pour la première fois en France en 1974, c'est un des chef d'oeuvre de la littérature du XX siècle.
L'histoire est simple. L'extraordinaire portrait d'un ingénieur, Hidalgo Gonzalo Pirobutirro d'Eltino, bourgeois, exécrant sa mère , d'une gloutonnerie gargantuesque, habité par un profond désespoir, perdu dans le décor d'un pays imaginaire mélange d'Amérique du Sud et de Pré-alpes italienne,
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Pasolini disait que " dans chaque phrase de Gadda, on peut voir le fulgurant résumé de l'histoire linguistique et donc de l'histoire tout court de l'Italie. Il y a le XIVe siècle, la Renaissance, le baroque, le classicisme, le romantisme, et le XXe siècle : parfois en six lignes seulement."
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Une écriture où régnent virtuosité verbale et érudition... Même la ponctuation est source d’imagination, elle est élément de son écriture comme le sont ses mots .
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" Je ne crois pas au veilleur de nuit : qui se glisse : comme une ombre : juste pour enfiler son ticket : dans la serrure de la grille : qui a deux cent cinquante villas, et bosquets annexes, à vélocipéder tout au long, dans le noir : disséminés à travers trois ou quatre communes ".
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Cela ne rend pas la lecture aisée. Nous ne sommes pas devant un long fleuve tranquille. Le tourment va se glisser jusque dans la virgule ou des infinitifs transformés en noms.
Ce livre est tel la Cordillère des Andes. Il ne se laisse pas conquérir facilement. Il se mérite. Il faut de volonté et persévérance. Chaque nouvelle lecture sera un nouveau voyage, difficile mais offrant de nouveaux paysages. A la fin, inlassablement, après à chaque traversée, jamais lassé, on s'exclamera, comme lors de la première lecture "quel chef d'oeuvre" !
"le Messie du Darfourl" de Abdelaziz Baraka Sakim
March 09, 2017
"Le Messie du Darfour" de Abdelaziz Baraka Sakim
aux Editions Zulma
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« C’était la seule à Nyala et sans doute même dans tout le Soudan à s’appeler Abderahman. » Avec son prénom d’homme et sa cicatrice à la joue, terrible signe de beauté, Abderahman est la fille de fortune de tante Kharifiyya, sans enfant et le cœur grand, qui l’a recueillie un jour de marché en lui demandant de ne jamais parler de la guerre. De la guerre, pourtant, Abderahman sait tout, absolument tout.
C’est un jour de marché qu’elle rencontre Shikiri, jeune idéaliste enrôlé de force dans l’armée, venu en permission chez sa tante Kharifiyya. Ni une, ni deux, Abderhaman en fait joyeusement son mari. Et lui demande dans la foulée de l’aider à se venger des terribles milices janjawids en en tuant au moins dix.
Formidable épopée d’une amazone de circonstance dans un monde en plein chaos, le Messie du Darfour est une histoire d’aventure et de guerre, une histoire d’amour et de vengeance, qui fait la part belle à l’humour et à la magie du roman.
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Premier livre traduit en français de cet auteur soudanais. Adulé dans son pays, mais censuré et pourchassé par les autorités de celui-ci, ses livres y circulent clandestinement.
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L'auteur avec un humour à la fois drôle et tragique, montre l'horreur de cette guerre sans fin et oubliée. Dans l'esprit du conte oriental, on entend les bruits, on sent les odeurs, on est entraîné dans une danse folle. La vie est là , mais dans un chaos incompréhensible, destructeur et futile.
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Le livre ne passe pas comme une lettre à la poste. Si il se digère facilement, le goût demeure. Une fois le dernier mot lu, le souvenir de ces combats, de cette déshumanisation, de cette absurdité reste. Le livre sera rangé dans la bibliothèque. Mais cette guerre du Darfour, stupide, primaire et d'une violence rare ne sera plus oubliée. Tout le talent de l'auteur est là .
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"Le rire est le salut de l'homme. Si j’utilise l’humour, c’est parce que écrire un roman est un acte artistique qui n’a rien à voir avec un rapport officiel ou un reportage; L’humour est un outil d’auteur présent dans la plupart de mes livres. C’est ma façon de mettre le malheur à distance et de laisser filtrer une lueur d’espoir". C'est ainsi que l'auteur présente son livre.
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"Article 353 du code pénal" de Tanguy Viel
March 02, 2017
"Article 353 du Code Pénal" de Tanguy Viel
aux Editions Minuit
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Pour avoir jeté à la mer le promoteur immobilier Antoine Lazenec, Martial Kermeur vient d'être arrêté par la police. Au juge devant lequel il a été déféré, il retrace le cours des événements qui l'ont mené là : son divorce, la garde de son fils Erwan, son licenciement et puis surtout, les miroitants projets de Lazenec.
Il faut dire que la tentation est grande d'investir toute sa prime de licenciement dans un bel appartement avec vue sur la mer. Encore faut-il qu'il soit construit.
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"Septième roman de Tanguy Viel, porté par la très belle voix de cet homme floué, quinquagénaire comme vieilli avant l’heure par le poids des infortunes et des échecs. Un homme las dont les mots s’emploient à construire la pensée, à tenter de comprendre l’agencement fatal des cirÂconstances qui l’ont mené au meurtre. Des mots, des phrases par lesquels il cherche désespérément à tracer, dans l’espace sonore du bureau du juge, pour lui-même autant que pour le magistrat, « la ligne droite des faits » – qui inclut « la somme des omissions et renoncements et choses inaccomplies », sachant que, dans son cas, « la ligne droite des faits, c’était comme l’enchaînement de mauvaises réponses à un grand questionnaire »." Nathalie Crom - Télérama.
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Livre troublant. Peut-etre impudique. Un homme dévoile son parcours, fait d'une vie simple, dure jalonnée de difficultés. Il a commis l’irréparable. Il n'est pas dans un acte de vengeance ou d'auto-justice, juste las de son sort. Un huis-clos avec ce juge qui veut comprendre. Pourquoi a-t-il fait ce geste. Martial Kermeur n'est pas un bandit, ni un homme violant. Pourquoi ce "suicide social".
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Je ressort ébranler de la lecture de ce livre. L'homme est faible, il n'est qu'un être humain. La justice doit sanctionner la faute. Elle est rendue par des hommes. Comme ceux-ci, elle est faible. Mais elle ne peut faillir. Avec un style de circonstance, une histoire ciselée, l'auteur nous mène vers une question : Qu'est ce que la justice ? Se poser la question, est déjà un premier pas vers une conscience de justice.
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"Plateau" de Franck Bouysse
February 23, 2017
"Plateau" de Franck Bouyssse
aux Editions La Manufactures des Livres
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Plateau, c’est un hameau en Haute-Corrèze où réside un couple de vieux paysans, Virgile et Judith. Judith, est maintenant atteinte d’Alzheimer, elle oublie tout sauf une chose : elle a mal vécu l’absence d’enfant dans le foyer. Le couple a élevé Georges, ce neveu dont les parents sont morts d’un accident de voiture alors qu’il avait cinq ans. Maintenant Georges vit dans une caravane face à la maison de Virgile et Judith. Alors lorsqu’une jeune femme rencontrée sur internet, emménage chez Georges, lorsqu’un ancien boxeur, Karl, tiraillé entre ses pulsions sexuelles et sa croyance en Dieu vient s’installer dans une maison du hameau et qu’un mystérieux chasseur sans visage rôde alentour, Plateau prend des allures de village où toutes les passions se déchaînent.
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"Ses mots, la finesse de son écriture, leur offrent une dimension tragique d’une rare beauté. Bouysse sait toucher au cœur car il aime chacun des êtres auxquels il donne chair, parce qu’il se glisse dans la tête de chacun d’entre eux, parce qu’il cherche à les comprendre intimement et révèle au lecteur cette intimité avec pudeur et clarté. L’âpreté, la noirceur, et la beauté des lieux et des cœurs sourdent de ce roman dont chaque page, ciselée, mêle la beauté formelle à celle de l’histoire qu’elle raconte. Noir et poétique, Plateau vient confirmer tout le bien que l’on pouvait penser de l’écriture de Franck Bouysse ; c’est un livre bouleversant et admirable." Yann Lespoux.
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Nous sommes non devant un roman, mais devant une oeuvre artistique faite de mots. La nature sauvage, les sentiments de chacun, l'âpreté de la vie, sont peints avec précision et méticulosité; utilisant non un pinceau mais une écriture fait de richesse et de poésie.
Un tableau bouleversant, d'une grande beauté.
"Ses doigts aux ongles carrelés dans une pulpe couleur d’ambre. Ses doigts qu’il ne parvient plus à déplier entièrement, qui ont tant agrippé, tant façonné de choses encore existantes et d’autres détruites depuis longtemps." Franck Bouysse Plateau
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"Arrête avec tes mensonges" de Philippe Besson
February 16, 2017
"Arrête avec tes mensonges" de Philippe Besson
aux Editions Julliard
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"L’auteur nous offre le roman qui l’a hanté toute sa vie, celui qui attendait dans un recoin de son âme le bon moment pour être écrit : le roman du chagrin d’amour originel qui a fait de Philippe Besson un écrivain. Parce que, ce qui est en jeu ici, c’est la manière dont cette histoire, finalement, traverse toute son oeuvre et l’éclaire, explique les motifs et les thèmes obsédants, les noms, les situations, les circonstances, fait tenir ensemble toutes les pièces du puzzle. Philippe Besson a toujours voulu n’écrire que de la fiction, inventer des histoires qui n’étaient pas les siennes, et pourtant, dans chacun de ses romans, derrière les masques des personnages, c’était bien lui et ses sentiments qui se dissimilaient : si Se résoudre aux adieux, par exemple, sonne si juste, c’est parce qu’à travers cette femme qui écrit à cet homme, c’est lui qui écrit à Thomas. Et c’est ça, selon moi, un grand écrivain : parvenir à transcender l’expérience personnelle pour dire l’universel. Dire le vrai en passant par le faux. Ce qui n’est pas strictement dire des mensonges…
On l’aura compris : ce roman m’a bouleversée et illuminée en même temps."
Caroline Doudet
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Il faut lite les pages 34 à 36. Que de tendresses, d'émotions, d'amour dans ces premiers regards pudiques. Quelques mots, peu de geste, pourtant tout est là .
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L'amour interdit et caché n'est qu'une virgule de ce roman. Ces pages sont la mémoire d'un temps disparu, le souvenir de la douce douleur de ce premier amour. Dans ce texte, il y de "l'amant" de Marguerite Duras. Un passé qui flotte au dessus, une désespérance de ce temps si merveilleux qui s'est échappé.
"Terreur" de Yann Moix
February 09, 2017
"Terreur" de Yann Moix
aux Editions Grasset
"Journal écrit, au jour le jour, à la suite des attentats de Charlie Hebdo et de l'hypercacher, son livre révèle la différence entre temps journalistique et temps humain ressenti...Ces notes n’étaient pas destinées à la publication, elles servaient de cheminement, ou peut-être de mise-à -plat. A tout instant surgissait la nécessité de prendre note, parce que le sujet ne lâchait pas l’écrivain, parce que la violence incompréhensible devient l’obsession de chaque instant, puisqu’on est encore en vie et qu’on a échappé à l’attentat." Christine Bini.
Il y a comme une forme de sidération de l'auteur face aux terroristes, Il intellectualise, il conceptualise leurs actes, leurs démarches. Certains diront que ses propos sont fulgurants, d'autres les qualifieront de pontifiants. La qualité littéraire est là , la réflexion est utile. Il agite les idées dans tous les sens. Il fait référence à de nombreux penseurs. Il interpelle notre société. Il nomme les terroristes. Il nous oblige à voir cette réalité : l'attentat est réel. Il le dit, nous le savons : nous vivons au jour le jour dans l'attente du prochain attentat.
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